Une initative de
Marie de Nazareth

La nuit de péché de Judas

dimanche 4 février 29
En route vers Meiéron

Vision de Maria Valtorta

       339.1 Une belle aurore de printemps teint de rose le ciel et égaie les collines. Les disciples s’en réjouissent tandis qu’ils se groupent à l’entrée du village pour attendre les retardataires.

       « C’est le premier jour où il ne fait pas froid, après les chutes de grêle, dit Matthieu en se frottant les mains.

       – ça devait bien finir par arriver ! C’est la nouvelle lune d’Adar ! s’exclame André.

       – Tant mieux ! Si on devait aller sur les montagnes avec le froid des jours derniers ! Remarque Philippe.

       – Mais où va-t-on ensuite ? demande André.

       – Qui sait… D’ici, on va à Séphet ou à Meiéron. Mais ensuite ? » lui répond Jacques, fils de Zébédée ; et il se tourne pour poser la question aux deux fils d’Alphée :

       « Est-ce que vous savez où l’on va, vous ?

       – Jésus a dit qu’il veut prendre la direction du nord, rien de plus, répond laconiquement Jude.

       – Encore une fois ? A la prochaine lune on doit commencer le pèlerinage de la Pâque… dit Pierre sans beaucoup d’enthousiasme.

       – Nous y arriverons bien à temps, réplique Jude.

       – Oui. Mais sans repos à Bethsaïde…

       – Nous y passerons certainement pour prendre les femmes et Marziam, répond Philippe à Pierre.

       – Ce dont je vous prie, c’est de ne pas vous montrer ennuyés, paresseux ou autre chose. 339.2Jésus est très affligé… Hier soir, il pleurait. Je l’ai trouvé en larmes pendant que nous, nous préparions le souper. Il ne priait pas, dehors sur la terrasse, comme nous le pensions. Mais il pleurait, dit Jean.

       – Pourquoi ? Tu le lui as demandé ? demandent-ils tous.

       – Oui. Mais il m’a seulement dit : “ Aime-moi, Jean. ”

       – C’est peut-être… pour les habitants de Chorazeïn. »

       Simon le Zélote survient :

       « Le Maître arrive avec Barthélemy. Allons à leur ren­contre. »

       Ils y vont tout en continuant leur conversation :

       « Ou à cause de Judas. Hier soir, ils étaient restés seuls…, dit Matthieu.

       – Oui ! Et Judas avait déclaré auparavant qu’il était inquiet et qu’il ne voulait personne avec lui, observe Philippe.

       – Il n’a même pas voulu rester avec le Maître ! Moi, j’y serais resté bien volontiers ! Soupire Jean.

       – Moi aussi ! Renchérissent-ils tous.

       – Cet homme ne me plaît pas… Il est soit malade, soit ensorcelé, soit fou, soit possédé… Il a quelque chose, dit péremptoirement Jude.

       – Et pourtant, soyez-en sûrs, pendant le voyage de retour il a été exemplaire. Il a toujours défendu le Maître et les intérêts du Maître, comme aucun de nous ne l’a jamais fait. Moi, je l’ai vu, je l’ai entendu ! Et j’espère que vous ne douterez pas de ma parole, déclare Thomas.

       – Tu penses qu’on ne te croit pas ? Mais non, Thomas ! Et cela nous fait plaisir que Judas soit meilleur que nous. Mais tu le vois ? Il est étrange, oui ou non ? demande André.

       – Oh ! Pour être étrange, il l’est ! Mais il souffre peut-être pour des choses intimes… Peut-être aussi parce qu’il n’a pas fait de miracle. Il est un peu fier. Oh, dans un bon but ! Mais il tient à faire beaucoup, à recevoir beaucoup d’éloges…

       – Hum ! Peut-être ! Toujours est-il que le Maître est triste. Regardez-le, là : il ne ressemble plus à l’homme que nous avons connu. Mais, vive le Seigneur ! Si je réussis à découvrir celui qui fait souffrir le Maître… Suffit ! Je sais ce que je vais lui faire » dit Pierre.

       339.3 Jésus, qui est en grande discussion avec Nathanaël, les voit et presse le pas en souriant.

       « La paix soit avec vous. Vous êtes tous ici ?

       – Il manque Judas… Je le croyais auprès de toi car, à la maison où il devait dormir, on m’a dit qu’on avait trouvé la pièce vide et tout en ordre… » explique André.

       Jésus plisse le front un instant et se plonge dans ses pensées, tête baissée. Puis il dit :

       « Peu importe, partons quand même. Vous direz à ceux des dernières maisons que nous allons à Meiéron, puis à Giscala. Si Judas nous cherche, qu’ils l’envoient là. Allons. »

       Tous sentent la tempête dans l’air et obéissent sans souffler mot. Jésus continue à parler avec Barthélemy, quelques pas devant les autres. Et j’entends citer de grands noms dans leur entretien : Hillel, Jahel, Barac et les gloires de la patrie qui passent dans les esprits et les conversations, ainsi que les commentaires admiratifs sur les grands docteurs. Et des regrets dans la bouche de Barthélemy…

       « Ah ! Si le Sage était encore vivant ! Hillel était bon, mais fort aussi. Il ne se serait pas laissé troubler. Il t’aurait jugé par lui-même !

       – Ne t’en soucie pas, Barthélemy ! Et bénis le Très-Haut de l’avoir pris dans sa paix. Ainsi l’esprit du Sage n’a pas connu le trouble d’une telle haine envers moi.

       – Mon Seigneur ! Pas de la haine seulement…

       – Plus de haine que d’amour, mon ami. Et il en sera toujours ainsi.

       – Ne t’attriste pas. Nous te défendrons…

       – Ce n’est pas la mort qui m’angoisse… C’est la vue du péché des hommes.

       – La mort, non ! Ne parle pas de mort. Ils n’arriveront pas à cela… parce qu’ils ont peur…

       – La haine sera plus forte que la peur. Barthélemy, quand je serai mort, puis quand je serai loin, dans le Ciel saint, dis-le aux hommes : “ Plus que de la mort, il a souffert de votre haine… ”

       – Maître ! Maître ! Ne dis pas cela ! Personne ne te haïra au point de te faire mourir. Et tu peux toujours l’empêcher, toi qui es puissant… »

       339.4 Jésus sourit tristement, je dirais même avec lassitude, pendant qu’il parcourt de son pas régulier la route montagneuse qui conduit à Meiéron. Plus on monte plus se découvre un beau et vaste panorama sur le lac de Tibériade qui apparaît dans le passage d’une gorge, sur les collines voisines en forme d’arc qui bouchent la vue sur le lac Mérom, et puis, au-delà du lac de Tibériade, sur le haut plateau de l’autre côté du Jourdain, jusqu’à la chaîne dentelée des monts lointains de l’Auran, de la Trachonitide et de la Pérée.

       Jésus indique pourtant la direction nord-nord-est :

       « Après la Pâque, nous devrons aller là-bas, dans la tétrarchie de Philippe. Et nous aurons à peine le temps d’être à Jérusalem pour la Pentecôte.

       – Mais ne te conviendrait-il pas de le faire tout de suite ? En passant de l’autre côté du Jourdain, vers ses sources… pour revenir par la Décapole… »

       Jésus se passe la main sur le front, avec la lassitude de quelqu’un qui a l’esprit obnubilé, et il murmure :

       « Je ne sais, je ne sais pas encore !… Barthélemy !… »

       Quel abattement, quelle souffrance, quel appel dans sa voix !…

       Barthélemy se penche un peu, comme s’il était blessé par ce ton étrange et nouveau chez Jésus et il dit, rendu haletant par son amour :

       « Maître, qu’as-tu ? Qu’attends-tu du vieux Nathanaël ?

       – Rien, Barthélemy… Ta prière… Pour que je voie bien ce que j’ai à faire… 339.5 Mais on nous appelle, Barthélemy… Faisons une halte ici… »

       Ils s’arrêtent près d’un bouquet d’arbres. De la courbe du sentier, les autres débouchent en groupe :

       « Maître, Judas nous suit en courant à perdre haleine…

       – Nous allons donc l’attendre. »

       Effectivement Judas apparaît bientôt, au pas de course…

       « Maître… j’ai tardé… Je suis resté endormi et…

       – Où donc, puisque je ne t’ai pas trouvé à la maison ? » demande André, étonné.

       Judas reste une minute interdit, mais il se reprend vite :

       « Oh ! Il me déplaît que ma pénitence soit connue ! J’ai été dans le bois toute la nuit, pour prier, faire des sacrifices… A l’aube, le sommeil m’a vaincu… Je suis un faible, moi… Mais le Très-Haut aura de la compassion pour son pauvre serviteur. N’est-ce pas, Maître ? Je me suis éveillé tard et je suis encore tout courbatu.

       – Effectivement, tu as le visage chiffonné » observe Jacques, fils de Zébédée.

       Judas rit :

       « Bien sûr ! Mais j’ai l’âme plus joyeuse. La prière fait du bien. La pénitence rend le cœur gai, et aussi humble et généreux. Maître, pardonne à ton imbécile de Judas… »

       Et il s’agenouille aux pieds de Jésus.

       « Oui. Lève-toi et partons.

       – Donne-moi la paix par ton baiser. Ce sera signe que tu m’as pardonné ma mauvaise humeur d’hier. Je n’ai pas voulu de toi, c’est vrai, mais c’était parce que je voulais prier…

       – Nous aurions pu prier ensemble… »

       Judas rit et dit :

       « Non, tu ne pouvais pas prier avec moi cette nuit, être là où je me trouvais…

       – ça par exemple ! Pourquoi donc ? Il est toujours avec nous et c’est lui qui nous a appris à prier ! » rétorque Pierre, étonné.

       Tous rient, mais pas Jésus. Il scrute fixement Judas qui l’a embrassé et qui le regarde, les yeux pleins de malice espiègle, comme s’il le défiait.

       Il ose répéter :

       « N’est-ce pas vrai que tu ne pouvais être avec moi cette nuit ?

       – Je ne le pouvais pas. Je ne pouvais pas et ne pourrai jamais, en effet, partager les étreintes de mon esprit avec mon Père, avec une tierce personne qui n’est que chair et sang, comme tu l’es, et dans les lieux où tu vas. J’aime la solitude peuplée d’anges pour oublier que l’homme est une puanteur de chair corrompue par les sens, par l’or, par le monde et par Satan. »

       Judas ne rit plus, même des yeux. Il répond sérieusement :

       « Tu as raison. Ton esprit a vu la vérité. 339.6 Où allons-nous, alors ?

       – Vénérer les tombes des grands rabbins et des héros d’Israël.

       – Quoi ? Comment ? Mais Gamaliel ne t’aime pas. Et les autres te haïssent, s’étonnent plusieurs.

       – Peu importe. Je m’incline sur la tombe des justes qui attendent la Rédemption. Je vais dire à leurs ossements : “ Bientôt, Celui qui a donné la respiration à votre âme sera au Royaume des Cieux, prêt à en descendre au dernier Jour pour vous faire revivre éternellement au Paradis. ” »

       Ils marchent tant et plus, jusqu’à ce qu’ils parviennent à Meiéron : c’est un beau village, bien tenu, plein de lumière et de soleil au milieu de collines fertiles et de sommets boisés.

       « Arrêtons-nous. Dans l’après-midi, nous irons d’ici à Giscala. Les grandes tombes sont éparses sur ces pentes dans l’attente du réveil glorieux. »

           Suit le dessin qui porte les inscriptions suivantes : au nord-ouest se trouvent les noms de Giscala, Meiéron, et Safed (dit ailleurs Sefet) ; au nord-est se trouve le groupe de montagnes appelé grand Hermon, mais encore plus au nord ; à l’est se trouvent la Gaulanitide et l’Auran, au sud la Pérée. Au centre sont esquissés, sans mention de noms, le lac de Tibériade et le Jourdain qui le traverse.

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