Une initative de
Marie de Nazareth

Eli-Hanna, le premier des persécutés à cause de Jésus

jeudi 1er novembre 29
Tecua

Vision de Maria Valtorta

       521.1 L’arrière de la maison de Simon de Tecua est simplement une place bordée par les deux ailes de la maison. Elle est en forme de . Je dis place, car, les jours de marché, comme celui que je vois, on ouvre en trois endroits la solide grille qui la sépare d’une place publique plus grande, et de nombreux vendeurs envahissent, avec leurs étalages, les portiques qui se trouvent sur les trois côtés de la maison et dont je comprends maintenant l’intérêt… financier : en bon juif, Simon perçoit de chaque marchand le loyer de la place qu’il occupe. Il se fait suivre du vieillard, revêtu d’un habit convenable, et le présente à tous les vendeurs en disant :

       « Voilà, dorénavant, c’est à lui que vous réglerez le prix convenu. »

       Puis, une fois fait le tour des portiques, il dit à Eli-Hanna :

       « Voilà ton travail. Ici, et à l’intérieur, avec l’auberge et les écuries. Il n’est ni difficile ni fatigant, mais il te montre l’estime que j’ai pour toi. J’ai chassé, l’un après l’autre, trois employés parce qu’ils n’étaient pas honnêtes. Mais tu me plais, et puis c’est Jésus qui t’a amené. Et le Maître sait reconnaître les cœurs. Allons le trouver maintenant pour lui dire que, s’il veut, c’est le bon moment pour parler. »

       Et il s’éloigne, suivi du petit vieux…

       La foule envahit de plus en plus la place et le bruit ne cesse d’augmenter : des femmes qui viennent faire leurs emplettes ; des marchands de bestiaux ; des acquéreurs de bœufs de labour ou d’autres animaux ; des paysans courbés sous le poids de paniers de fruits et qui vantent leur marchandise ; des couteliers avec leurs étalages d’instruments tranchants et qui, avec un bruit infernal, cognent les haches sur des souches de bois pour montrer la solidité de la lame, ou bien qui tapent avec un marteau sur des faux suspendues à des chevalets pour faire voir la trempe parfaite de la lame ; parfois, ils soulèvent des socs et à deux mains les piquent dans la terre, qui s’ouvre, déchirée, pour donner une preuve de la solidité du soc auquel aucun terrain ne résiste ; et des chaudronniers avec des amphores et des seaux, des poêles et des lampes, dont ils frappent le métal en faisant un bruit assourdissant pour montrer qu’il est massif. En outre, ils crient à pleine gorge pour offrir des lampes à un ou plusieurs becs pour les fêtes prochaines de Casleu ; et par dessus tous ces bruits, monotone et perçant comme le cri plaintif de la chouette durant la nuit, le cri des mendiants, disséminés aux points stratégiques du marché.

       521.2 Jésus vient de la maison avec Pierre et Jacques, fils de Zébédée. Je ne vois pas les autres. Je pense qu’ils font un tour en ville pour annoncer la présence du Maître, car je remarque que la foule le reconnaît immédiatement et que beaucoup de gens accourent alors que s’affaiblissent les voix et le bruit du marché. Jésus fait donner l’obole à quelques mendiants et s’arrête pour saluer deux hommes qui, suivis de leurs serviteurs, allaient quitter la place, leurs achats faits. Mais ils s’arrêtent, eux aussi, pour écouter le Maître. Et Jésus commence à parler en partant de ce qu’il voit :

       « Chaque chose en son temps, chaque chose à sa place. On ne tient pas le marché le sabbat, on ne fait pas de commerce dans les synagogues, et on ne travaille pas non plus la nuit, mais au contraire pendant qu’il fait jour. Seul le pécheur fait du commerce le jour du Seigneur, ou profane par des trafics humains les lieux destinés à la prière, ou agit en malfaiteur pendant la nuit en commettant des vols et des crimes. Au contraire, le commerçant honnête s’efforce de prouver aux acheteurs la belle qualité de ses denrées et la solidité de ses outils, et l’acheteur repart satisfait de sa bonne acquisition. Mais si, par exemple, à force de ruse, le vendeur réussissait à tromper l’acheteur, et que ce dernier se rendait compte que la denrée ou l’outil acheté était de mauvaise qualité et qu’il l’avait payé trop cher, est-ce que l’acheteur n’aurait pas recours à des moyens de défense, qui peuvent aller de ne plus jamais rien acheter à ce marchand jusqu’au recours au juge pour récupérer son argent ? C’est ce qui arriverait, et ce serait juste.

       Et pourtant ne voyons-nous pas, nous en Israël, le peuple trompé par des gens qui vendent des marchandises avariées pour des bonnes et dénigrent le vendeur de bonnes marchandises, puisqu’il est le Juste du Seigneur ? Oui, nous le voyons tous.

       Hier soir plusieurs d’entre vous sont venus raconter les agissements des mauvais vendeurs, et moi, j’ai dit : “ Laissez-les faire. Gardez vos cœurs fermes, et Dieu pourvoira. ”

       Ceux qui vendent des produits qui ne sont pas bons, qui offensent-ils ? Vous ? Moi ? Non : Dieu lui-même. Le coupable, c’est moins le trompé que le trompeur. Ce n’est pas tant un péché contre l’homme que contre Dieu que de chercher à écouler de mauvais produits, pour que celui qui souhaite acheter n’aille pas vers les bons. Moi je ne vous dis pas : réagissez, vengez-vous. Ce n’est pas une parole qui puisse venir de moi. Je vous dis seulement : écoutez le vrai son des mots, observez bien, en pleine lumière, les actions de celui qui vous parle, goûtez la première gorgée ou la première bouchée qui vous est offerte, et si vous sentez de l’aigreur, si la conduite d’autrui a quelque chose de ténébreux, si le goût qui vous reste dans le cœur vous trouble, repoussez ce qui vous est offert comme quelque chose de mauvais. La sagesse, la justice, la charité ne sont jamais aigres, ne troublent pas et n’aiment pas agir dans l’ombre.

       521.3 Je sais que j’ai été précédé par mes disciples, et je vous laisse deux de mes apôtres. De plus, hier soir, j’ai témoigné, par mes actes plus que par mes paroles, d’où je viens et pour quelle mission. Il n’est donc pas besoin de longs discours pour vous attirer à ma voie. Réfléchissez et ayez la volonté d’y demeurer. Imitez les fondateurs de cette ville érigée à la limite du désert. N’oubliez jamais qu’en dehors de ma doctrine, vous ne trouveriez que l’aridité désertique, alors qu’en elle se trouvent les sources de la Vie. Et, si nombreux que soient les événements qui peuvent survenir, ne vous troublez pas, ne vous scandalisez pas. Rappelez-vous les paroles du Seigneur dans Isaïe. Jamais ma main ne pourrait se rabougrir : elle comblera toujours de bienfaits ceux qui suivent mes voies ; de même, jamais la main du Très-Haut ne sera réduite à rien quand il s’agira de frapper ceux qui me causent offense et douleur, à moi qui suis venu et qui ai trouvé bien peu de cœurs pour m’accueillir, à moi qui ai appelé, sans obtenir beaucoup de réponses. Car, de même qu'une personne qui me fait honneur honore le Père qui m’a envoyé, ainsi celle qui me méprise, méprise celui qui m’a envoyé. Et, conformément à l’antique loi du talion, celle qui me repousse sera repoussée.

       Mais vous qui avez accueilli ma parole, ne craignez pas les opprobres des hommes et ne tremblez pas à cause de leurs outrages adressés d’abord à moi, et ensuite à vous parce que vous m’aimez. Bien que je paraisse persécuté et même si je semblais frappé, moi, je vous consolerai et vous protégerai. N’ayez pas peur, ne redoutez pas l’homme mortel qui est aujourd’hui et qui demain ne sera qu’un souvenir et de la poussière. Mais craignez le Seigneur, craignez-le avec un saint amour, pas avec peur, craignez de ne pas savoir l’aimer en proportion de son amour infini. Je ne vous dis pas : faites ceci ou cela. Ce qu’il faut faire, vous le savez. Je vous le redis : aimez. Aimez Dieu et son Christ, aimez votre prochain comme je vous l’ai enseigné. Et vous ferez tout bien, si vous savez aimer.

       521.4 Je vous bénis, habitants de Tecua, ville en bordure du désert mais oasis de paix pour le Fils de l’homme persécuté, et que ma bénédiction soit dans vos cœurs et sur vos maisons, maintenant et toujours.

       – Reste, Maître ! Reste avec nous. Le désert a toujours été bon pour les saints d’Israël !

       – Cela m’est impossible. D’autres m’attendent. Vous êtes en moi et moi en vous, puisque nous nous aimons. »

       Jésus a du mal à fendre la foule qui le suit, oubliant le commerce et toute autre chose. Malades guéris qui le bénissent encore, cœurs consolés qui le remercient, mendiants qui le saluent : “ Vivante Manne de Dieu ”…

       521.5 Le petit vieux est à ses côtés, il y reste jusqu’aux limites de la ville. Et c’est seulement quand Jésus bénit Matthieu et Philippe qui restent à Tecua, qu’il se décide à quitter son Sauveur, après avoir baisé les pieds nus du Maître, les larmes aux yeux et en exprimant toute sa reconnaissance.

       « Lève-toi, Eli-Hanna, et viens, que je te donne un baiser, le baiser d’un fils à un père. Que cela te récompense de tout. Je t’applique les paroles du prophète : “ Toi qui pleures, tu ne pleureras plus, car le Miséricordieux a eu pitié de toi. ” Le Seigneur t’a donné un peu de pain et d’eau. Je n’ai pu faire davantage. Si tu as été chassé par un seul, j’ai pour me chasser tous les puissants d’un peuple, et c’est beaucoup si je trouve pour moi et mes apôtres un peu de nourriture et un abri. Mais tes yeux ont vu Celui que tu désirais voir, et tes oreilles ont entendu mes paroles, de même que ton cœur doit sentir mon amour. Va, et sois en paix, car tu es un martyr de la justice, un des précurseurs de tous ceux qui seront persécutés à cause de moi. Ne pleure pas, père ! »

       Puis il pose un baiser sur sa tête chenue.

       Le vieillard lui rend son baiser sur la joue et lui murmure à l’oreille :

       « Méfie-toi de l’autre Judas, mon Seigneur. Je ne veux pas souiller ma langue… Mais méfie-toi. Ce n’est pas avec de bonnes pensées qu’il vient chez mon fils…

       – Oui. Mais ne pense plus au passé. Tout sera bientôt fini et personne ne pourra plus me nuire. Adieu, Eli-Hanna. Le Seigneur est avec toi. »

       Ils se séparent…

       521.6 « Maître, que t’a murmuré le vieillard ? demande Pierre qui marche à côté de Jésus — et avec peine, car Jésus fait de grands pas avec ses longues jambes, chose impossible pour Pierre à cause de sa petite taille.

       – Pauvre vieillard ! Que veux-tu qu’il me dise que je ne sache déjà ? répond Jésus en évitant d’être plus précis.

       – Il parlait de son fils, hein ? Il t’a avoué de qui il s’agit ?

       – Non, Pierre. Je te l’assure. Il a gardé ce nom dans son cœur.

       – Mais tu le connais ?

       – Je le connais, mais je ne te le dirai pas. »

       Un silence prolongé. Puis, tourmentée, la question de Pierre et son aveu.

       « Mais pourquoi, Maître, dans quel but Judas va-t-il chez un homme très mauvais comme le fils d’Eli-Hanna ? J’ai peur, Maître ! Il n’a pas de bons amis. Il n’y va pas ouvertement. Il n’a pas en lui la force de résister au mal. J’ai peur, Maître. Pourquoi ? Pourquoi Judas va-t-il chez ces gens et en cachette ? »

       Le visage de Pierre exprime une interrogation anxieuse.

       Jésus le regarde sans répondre. Que devrait-il répondre, en effet, pour ne pas mentir ni monter le fidèle Pierre contre l’infidèle Judas ? Il préfère le laisser parler.

       « Tu ne réponds pas ? Moi, depuis hier, depuis le moment où le vieillard a cru reconnaître Judas parmi nous, je n’ai pas de paix. C’est comme le jour où tu as parlé avec l’épouse du sadducéen. Tu te souviens ? Tu te souviens de mon soupçon ?

       – Je me le rappelle. Et toi, tu te rappelles ce que je t’ai dit alors ?

       – Oui, Maître.

       – Il n’y a rien à ajouter, Simon. Les actes de l’homme ont une apparence différente de la réalité. Mais je suis content d’avoir pourvu aux besoins de ce vieillard. C’est comme si Ananias était revenu. Et vraiment, si Simon de Tecua ne l’avait pas accueilli, je l’aurais conduit dans la maisonnette de Salomon, pour qu’il y ait toujours un père pour nous attendre. Mais pour Eli, c’est mieux ainsi. Simon est bon, il a de nombreux petits-enfants. Eli aime les enfants… Et les enfants font oublier tant de choses douloureuses… »

       Avec son habituel savoir-faire pour distraire l’interlocuteur et l’amener à aborder d’autres sujets, quand il trouve qu’il ne convient pas de répondre à des questions dangereuses, Jésus a détourné Pierre de sa pensée. Et il continue à lui parler des enfants qu’il a connus ça et là, pour arriver à lui rappeler Marziam, qui, peut-être à cette heure, tire les filets après avoir pêché dans le beau lac de Génésareth.

       Pierre est loin maintenant de penser encore à Eli et à Judas, et il sourit en demandant :

       « Mais, après la Pâque, nous irons là-bas, n’est-ce pas ? C’est si beau ! Beaucoup plus qu’ici ! Nous autres, Galiléens, nous sommes des pécheurs pour les Judéens… Mais s’il fallait vivre ici ! Oh ! Miséricorde éternelle ! Si nous, nous serons châtiés, il est sûr que, dans cette région, il n’y aura pas de récompense. »

       Jésus appelle les autres, qui sont restés en arrière, et il s’éloigne avec eux sur la route réchauffée par le soleil de décembre.

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