Une initative de
Marie de Nazareth

Mission et destin des “ voix de Dieu ”

mercredi 7 mars 29
vers Béthel

Vision de Maria Valtorta

       362.1 Ils sont maintenant de l’autre côté du Jourdain et marchent rapidement vers le sud-ouest en direction d’une seconde chaîne de collines, plus élevée que la première, des collines basses au-delà desquelles se trouve la plaine du Jourdain. Je comprends à leurs conversations qu’ils ont évité la plaine pour ne pas retomber dans la boue qu’ils ont laissée de l’autre côté, et ils pensent suivre les routes de l’intérieur qui sont mieux entretenues et plus praticables, surtout par temps de pluie.

       « Où pouvons-nous être ? demande Matthieu, qui s’oriente mal.

       – Entre Silo et Béthel, certainement » répond Thomas. « Je reconnais ces montagnes. J’y suis passé, il y a peu de temps, avec Judas, qui a été reçu à Béthel par des pharisiens.

       – Tu pouvais l’être toi aussi. Tu n’as pas voulu venir. Mais ni eux ni moi ne t’avons dit : “ Ne viens pas. ”

       – Et je ne prétends pas non plus que vous me l’ayez dit. Je dis seulement que j’ai préféré rester avec les disciples qui évangélisaient là. »

       L’incident est clos. André se réjouit même :

       « Si à Béthel nous avons des pharisiens comme amis, on ne nous attaquera pas.

       – Mais nous revenons en arrière au lieu d’aller à Jérusalem, lui objectent-ils.

       – Nous devrons pourtant y aller pour la Pâque et je ne sais pas comment nous ferons…

       – Mais oui ! Pourquoi a-t-il dit que nous retournons à Cana ? Les femmes pouvaient revenir, et nous, accomplir le pèle­ri­nage…

       – Il est écrit que ma femme ne fera pas la Pâque à Jérusalem ! » s’exclame Pierre.

       362.2 Jean interpelle Jésus qui est en grande conversation avec Simon le Zélote :

       « Maître, comment ferons-nous pour aller et revenir à temps ?

       – Je ne sais pas. Je m’en remets à Dieu. Si nous sommes en retard, ce ne sera pas ma faute.

       – Tu as bien fait d’être prudent, dit Simon le Zélote.

       – Oh ! Pour ma part, j’aurais continué car mon heure n’est pas encore venue. Je le sens. Mais vous, comment auriez-vous supporté l’aventure, vous qui depuis quelque temps êtes si… fatigués ?

       – Maître… tu as raison. On dirait qu’un démon a répandu son haleine parmi nous. Nous sommes tellement changés !

       – L’homme se fatigue. Il veut que les choses aillent vite, et il a des rêves déraisonnables. Quand il s’aperçoit que le rêve est différent de la réalité, il se trouble et, s’il n’est pas de bonne volonté, il fléchit. Il ne se souvient pas que le Tout-Puissant, qui pouvait faire naître l’univers du chaos en un instant, l’a fait en des phases régulières et séparées en espaces de temps appelés jours. Je dois faire jaillir le Royaume de Dieu du chaos spirituel de tout un monde. Et je le ferai. J’en construirai les bases, je suis en train de les construire, et je dois briser la roche très dure pour y tailler des fondements qui ne s’écrouleront pas. Vous en élèverez lentement les murs. Vos successeurs continueront cette œuvre en hauteur et en largeur. De même que, moi, je mourrai au travail, vous aussi vous mourrez, et il y en viendra d’autres qui mourront en versant leur sang ou non, mais consumés par ce travail qui demande l’esprit d’immolation, de générosité, ainsi que des larmes, du sang et une infinie patience… »

       362.3 Pierre passe sa tête grisonnante entre Jésus et Jean.

       « On peut savoir ce que vous dites ?

       – Ah ! Simon ! Viens ici. Nous parlions de la future Eglise. J’expliquais qu’au lieu de vos hâtes, de vos lassitudes, de vos découragements et ainsi de suite, elle réclamait calme, constance, effort, confiance. J’expliquais qu’elle demande le sacrifice de tous ses membres, de moi, qui en suis le Fondateur et la Tête mystique, jusqu’à vous, jusqu’à tous les disciples, jusqu’à tous ceux qui porteront le nom de chrétiens et appartiendront à l’Eglise universelle. Et, en vérité, dans la grande échelle des hiérarchies, ce seront souvent les plus humbles, ceux qui sembleront être de simples “ numéros ”, qui rendront l’Eglise vraiment vivante. En vérité, je devrai souvent me réfugier en eux pour continuer à maintenir vivantes la foi et la force des collèges apostoliques toujours renouvelés ; et je devrai laisser ces apôtres être tourmentés par Satan et par des hommes envieux, orgueilleux et incrédules. Et leur martyre moral ne sera pas moins pénible que le martyre matériel, pris comme ils le seront entre la volonté active de Dieu et la volonté mauvaise de l’homme, instrument de Satan, qui appliquera tout son soin et toute sa violence à les faire passer pour des menteurs, des fous, des obsédés, pour paralyser en eux mon œuvre et ses fruits, qui sont autant de coups victorieux contre la Bête.

       – Et ils résisteront ?

       – Et ils résisteront sans même m’avoir matériellement avec eux. Ils devront croire non seulement à ce qu’il faut croire obligatoirement, mais aussi à leur mission secrète, la croire sainte, la croire utile, croire qu’elle vient de moi, alors que Satan sifflera autour d’eux pour les terroriser, et que le monde criera pour les tourner en ridicule, ainsi que des ministres de Dieu, pas toujours parfaitement éclairés, pour les condamner. C’est le destin de mes futures voix. Et pourtant je n’aurai pas d’autres ressources pour secouer les hommes, les ramener à l’Evangile et au Christ ! Mais pour tout ce que je leur aurai demandé et imposé, pour tout ce que j’aurai reçu d’eux, je leur donnerai une joie éternelle, une gloire toute spéciale !

       362.4 Il y a au Ciel un livre fermé. Dieu seul peut le lire. Il renferme toutes les vérités. Mais parfois Dieu ouvre les sceaux et réveille les vérités déjà dites aux hommes en contraignant un homme, choisi pour ce destin, à connaître le passé, le présent et l’avenir tels que ce livre mystérieux les contient. Avez-vous jamais vu un enfant, le meilleur de la famille, ou un écolier, le meilleur de la classe, appelé par son père ou par son maître à lire un livre de grandes personnes et à en recevoir l’explication ? L’enfant se tient à côté de son père ou de son maître qui l’entoure d’un bras, alors que de la main opposée il montre du doigt les lignes qu’il veut faire connaître à son préféré. C’est ce que Dieu fait pour ceux qu’il appelle à une telle destinée. Il les attire, les retient par son bras et les force à lire ce qu’il veut, à en comprendre le sens, à le divulguer ensuite, quitte à en recueillir mépris et douleur. Moi, l’Homme, je suis le Chef de file de ceux qui proclament les vérités du Livre céleste, et j’en reçois mépris, douleur et mort. Mais déjà le Père prépare ma gloire. Et une fois que je serai monté auprès de lui, je préparerai la gloire de ceux que j’aurai forcés à lire dans le livre fermé les passages que j’ai choisis, et en présence de toute l’humanité ressuscitée et des chœurs angéliques, je les montrerai pour ce qu’ils ont été, en les appelant auprès de moi tandis que j’ouvrirai les sceaux du Livre que désormais il sera inutile de tenir fermé ; et eux souriront en revoyant écrites, en relisant les paroles que j’avais déjà éclairées pour eux quand ils souffraient sur la terre.

       362.5 – Et les autres ? demande Jean, très attentif à l’instruction.

       – Quels autres ?

       – Les autres qui, comme moi, n’ont pas lu ce livre sur la terre, ils ne sauront jamais ce qu’il dit ?

       – Au Ciel, tout sera connu des bienheureux. Ils connaîtront, absorbés dans la Sagesse infinie.

       – Tout de suite ? A peine morts ?

       – Tout de suite, dès l’entrée dans la Vie.

       – Mais alors pourquoi au Dernier Jour feras-tu voir que tu les appelles à connaître le Livre ?

       – Parce qu’il ne sera pas connu des seuls bienheureux, mais de toute l’humanité. Et parmi les damnés, il y en aura beaucoup qui auront tourné en dérision les voix de Dieu pour les présenter comme celles de fous et de possédés, et qui les auront tourmentés pour ce don que je leur ai fait. C’est une longue mais obligatoire revanche, accordée à ces martyrs de la méchanceté obtuse du monde.

       – Comme ce sera beau de voir cela ! S’écrie Jean, ravi.

       – Oui, et de voir tous les pharisiens grincer des dents avec rage, dit Pierre en se frottant les mains.

       – Oh ! Moi je pense que je regarderai seulement Jésus et les bénis qui liront avec lui le Livre… » répond Jean qui rêve à cette heure, les yeux perdus dans je ne sais quelle vision de lumière, éclaircis par une larme d’émotion qui reste dans l’œil et en fait briller l’iris bleu clair, avec un sourire enfantin sur ses lèvres rouges.

       Simon le Zélote le regarde, Jésus aussi. Mais Jésus ne dit rien. Simon, en revanche, intervient :

       « Tu te regarderas toi-même alors ! Car si, parmi nous, il y en a un qui doit être “ voix de Dieu ” sur la terre et qui sera appelé à lire les passages du Livre scellé, ce sera bien toi, Jean, toi qui es le préféré de Jésus et l’ami de Dieu.

       – Ah ! Ne dis pas cela ! Je suis le plus ignorant de tous. Et si Jésus n’avait pas assuré que c’est aux enfants qu’appartient le Royaume des Cieux, je ne penserais pas pouvoir le posséder, tant je ne suis qu’un bon à rien. N’est-ce pas, Maître, que ma seule valeur, c’est de ressembler à un enfant ?

       – Oui, tu appartiens à la bienheureuse enfance, et sois-en béni ! »

       362.6 Ils marchent encore quelque temps, puis Pierre, qui se retourne pour regarder derrière lui la route caravanière sur laquelle ils se trouvent désormais, s’écrie :

       « Miséricordieuse Providence ! Mais c’est le char des femmes ! »

       Tout le monde se retourne. C’est effectivement le lourd char de Jeanne qui avance au trot de deux robustes chevaux. Ils s’ar­rêtent pour l’attendre. La capote de cuir entièrement descendue ne permet pas de voir qui se trouve à l’intérieur. Mais Jésus fait signe d’arrêter et le conducteur pousse une exclamation de joie quand il voit Jésus debout, les bras levés, au bord de la route.

       Alors que l’homme arrête les deux chevaux qui soufflent, le visage maigre d’Isaac paraît à l’ouverture :

       « Le Maître ! » s’écrie-t-il. « Mère, réjouis-toi ! Il est ici ! »

       Des voix de femmes, des bruits de pas, se font entendre dans le char, mais avant qu’une seule d’entre elles ne descende, Manahen, Marziam et Isaac ont déjà sauté à terre et accourent pour vénérer le Maître.

       « Encore ici, Manahen ?

       – Fidèle à la consigne, et maintenant plus que jamais parce que les femmes avaient peur… Mais… Nous t’avons obéi parce qu’il faut obéir, mais crois bien qu’il n’y a rien de préoccupant. Je sais de source sûre que Pilate a rappelé à l’ordre ceux qui mettent le trouble, en disant que quiconque en serait responsable pendant ces jours de fête serait sévèrement puni. Je crois que la femme de Pilate n’est pas étrangère à cette protection, et encore moins ses amies. A la cour, on sait tout et rien. Mais on est assez informé… »

       362.7 Puis Manahen s’écarte pour céder la place à Marie, qui est descendue du char et a fait quelques mètres de route, toute tremblante et émue.

       Ils s’embrassent pendant que toutes les femmes disciples vénèrent le Maître. Cependant Marie et Marthe, sœurs de Lazare, ne sont pas là.

       Marie murmure :

       « Quelle angoisse depuis ce soir-là ! Mon Fils, comme ils te haïssent tous ! »

       Des larmes coulent le long des marques rouges, traces de beaucoup d’autres qu’elle a versées ces derniers jours.

       « Mais tu vois que le Père pourvoit à tout. Ne pleure donc pas ! Je défie avec courage toute la haine du monde, mais une seule de tes larmes m’accable. Allons, Mère sainte ! »

       Et, la tenant enlacée, il se tourne vers les femmes disciples pour les saluer ; il a un mot particulier pour Jeanne qui a voulu revenir en arrière pour accompagner Marie.

       « Oh, Maître ! On n’a pas de peine à rester avec ta Mère. Marie est retenue à Béthanie par les souffrances de son frère. Moi, je suis venue. J’ai laissé les enfants à la femme du gardien du palais, qui est bonne et maternelle. Mais il y a aussi Kouza qui y veille. Et tu peux être sûr qu’il ne manquera rien au cher Matthias, que mon mari aime particulièrement ! Pourtant Kouza m’a dit aussi qu’il était inutile de partir. L’avertissement du Proconsul a brisé les ongles même à Hérodiade. Quant au Tétrarque, il tremble de peur et n’a qu’une pensée : veiller à ce qu’Hérodiade ne le ruine pas aux yeux de Rome. La mort de Jean a causé beaucoup de tort à Hérodiade. En outre, Hérode se rend fort bien compte que le peuple est révolté contre lui à cause du meurtre de Jean. Ce renard comprend que son pire châtiment serait de perdre la protection haineuse et dérisoire de Rome. Le peuple s’en prendrait à lui aussitôt. Par conséquent, n’en doute pas, il ne prendra aucune initiative !

       362.8 – Dans ce cas, retournons à Jérusalem ! Vous pouvez avancer en toute sécurité. Allons ! Que les femmes remontent sur le char et avec elles Matthieu et ceux qui sont fatigués. Nous nous reposerons à Béthel. Allons-y. »

       Les femmes obéissent. Matthieu et Barthélemy montent avec elles. Les autres préfèrent suivre le char à pied avec Manahen, Isaac et Marziam. Et Manahen raconte comment il s’est informé pour savoir ce qu’il y avait de vrai dans les racontars de l’hérodien qui avait semé l’inquiétude dans la paisible retraite de Béthanie près de Lazare “ très souffrant ”, selon Manahen.

       « Est-il venu une femme à Béthanie ?

       – Non, Seigneur. Mais nous en sommes absents depuis trois jours. De qui s’agit-il ?

       – D’une femme disciple : comme elle est jeune, seule et sans moyens, je la confierai à Elise.

       – Elise est au palais de Jeanne. Elle voulait venir, mais elle est très enrhumée. Elle brûlait de te voir. Elle disait : “ Mais vous ne comprenez pas que sa vue me donne la paix ? ”

       – Je lui donnerai aussi une joie avec cette jeune femme. 362.9Et toi, Marziam, tu ne parles pas ?

       – J’écoute, Maître.

       – Le garçon écoute et écrit. Par l’un, par l’autre, il se fait répéter tes paroles et il écrit, il écrit. Mais les aurons-nous bien dites, nous ? dit Isaac.

       – Je les regarderai moi-même, et j’ajouterai ce qui manque dans le travail de mon disciple » répond Jésus en caressant la joue légèrement brune de Marziam.

       Puis il demande :

       « Et ton grand-père ? Tu l’as vu ?

       – Oh oui ! Il ne me reconnaissait pas. Il a pleuré de joie. Mais nous le reverrons au Temple, car Ismaël les envoie. D’ailleurs, il leur a donné cette année quelques jours de plus. Il a peur de toi.

       – Naturellement ! Après le petit ennui arrivé à Chanania au mois de Shebat ! Dit Pierre en riant.

       – Toutefois, la peur de Dieu ne construit pas, elle démolit plutôt. Ce n’est pas de l’amitié, c’est une précaution qui souvent se change en haine. Mais chacun donne ce qu’il peut… »

       Ils continuent leur route et je les perds de vue.

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