Une initative de
Marie de Nazareth

Un repentir de Judas

lundi 13 août 29
Chorazeïn

Précisions de Jésus à Maria Valtorta

       468.1 Jésus dit :

       « Entre-temps, je te dis que, si vous faites une œuvre régulière, vous devez placer l’épisode de mercredi (20 septembre 1944) un an avant ma mort, car il tombe à l’époque de la moisson de ma trente-deuxième année.

       Des nécessités de réconfort et d’instruction pour toi, ma bien-aimée, et pour d’autres, m’ont contraint à suivre un ordre spécial pour donner les visions et les dictées qui s’y rapportaient. Mais je vous indiquerai, au moment voulu, comment répartir les épisodes des trois années de vie publique.

       L’ordre des évangiles est bon, mais pas parfait chronologiquement parlant. Un observateur attentif le remarque. Celui qui aurait pu donner l’ordre exact des faits — puisqu’il est resté avec moi depuis le commencement de l’évangélisation jusqu’à mon ascension —, ne l’a pas fait. En effet Jean, en vrai fils de la Lumière, s’est occupé et préoccupé de faire briller la Lumière à travers son vêtement de chair aux yeux des hérétiques qui attaquaient la réalité de la Divinité enfermée dans une chair humaine. Le sublime évangile de Jean a atteint son but surnaturel, mais la chronique de ma vie publique n’en a pas été aidée.

       Les trois autres évangélistes sont semblables en ce qui concerne les faits, mais ils altèrent l’ordre du temps, car un seul des trois a été présent à presque toute ma vie publique : Matthieu, et il ne l’a mise par écrit que quinze ans plus tard. Quant aux autres, ils l’ont fait encore plus tard, et après en avoir entendu le récit de ma Mère, de Pierre, ainsi que des autres apôtres et disciples.

       Je veux vous guider pour réunir les faits des trois ans, année par année.

       Et maintenant, vois et écris : cet épisode suit celui de mercredi (20 septembre 1944). »

                                                                   ***

Vision de Maria Valtorta

       468.2 Je vois Jésus aller et venir lentement sur un sentier champêtre éclairé par la lune. C’est la pleine lune, et sa face riante resplendit dans un ciel absolument serein mais, en raison de sa position dans le ciel où elle se prépare à se coucher, je déduis qu’il doit être plus de minuit.

       Jésus marche en réfléchissant et, j’en suis sûre, en priant, bien que je n’entende pas de paroles. Mais il ne perd pas de vue ce qui l’entoure. Il s’arrête une fois pour écouter, tout sourire, le long chant d’un rossignol amoureux qui exécute toute une mélodie d’arpèges, de trilles et de notes seules, bien tenues, si fortes et si prolongées qu’il paraît impossible que cela vienne de ce petit être qui n’est que plumes. Pour ne pas le troubler, même pas par le bruit des sandales sur le gravier du sentier et du vêtement frôlant l’herbe, Jésus s’est arrêté, les bras croisés, le visage levé et souriant. Il va jusqu’à fermer à demi les yeux pour mieux se concentrer sur ce qu’il entend et, quand le rossignol termine par un son aigu qui monte, monte, monte par intervalles de tierce (si j’ai bon souvenir) et finit par une note suraigüe, tenue aussi longtemps que le souffle le lui permet, il approuve et applaudit sans mot dire en inclinant deux ou trois fois la tête avec un sourire de satisfaction.

       Le voilà maintenant qui se penche sur une touffe de chèvrefeuille en fleurs dont les milliers de calices blancs répandent une odeur pénétrante. Ils ressemblent à des bouches de serpents qui baillent, où tremble la langue des pistils jaunâtres et où brille une trace d’or sur le pétale inférieur. Les fleurs, sous le rayon de lune, paraissent encore plus blanches, comme argentées. Jésus les admire, respire leur parfum et les caresse de la main.

       Il revient sur ses pas. L’endroit doit être légèrement élevé, car le clair de lune laisse entrevoir au sud une partie du lac certainement, car cela brille comme du verre éclairé par la lune. Or ce n’est ni un fleuve ni la mer, étant donné qu’on le voit bordé de collines du côté opposé à celui où se trouve Jésus.

       Jésus contemple ce paisible miroir d’eau dans le calme d’une nuit d’été. Puis il fait un quart de tour sur lui-même, du sud à l’ouest, et regarde un village qui blanchit, éloigné au maximum de deux kilomètres — plutôt moins que plus. C’est un beau village. Il s’arrête pour l’admirer, et secoue la tête en suivant une pensée qui l’afflige beaucoup.

       Il reprend ensuite sa promenade lente et sa prière jusqu’au moment où il s’assied sur une grosse pierre, au pied d’un arbre très élevé, et prend sa position habituelle : les coudes sur les genoux et les avant-bras en avant, avec les mains jointes pour la prière.

       468.3 Il reste ainsi un moment et se serait attardé si un homme, une ombre, ne s’était avancé de la touffe d’arbres vers lui et ne l’avait appelé :

       « Maître ? »

       Jésus se retourne — car l’homme arrive par derrière — et il lui dit :

       « Judas ? Que veux-tu ?

       – Où es-tu, Maître ?

       – Au pied du noyer. Avance. »

       Et Jésus se lève et vient sur le sentier au clair de la lune, pour que Judas puisse le voir.

       « Tu es venu, Judas, pour tenir un peu compagnie à ton Maître ? »

       Ils sont maintenant l’un près de l’autre, et Jésus passe affectueusement un bras sur l’épaule du disciple.

       « Ou bien a-t-on besoin de moi à Chorazeïn ?

       – Non, Maître, aucunement. J’ai eu le désir de venir te trouver.

       – Alors viens. Il y a de la place pour deux sur ce rocher. »

       Ils s’asseyent l’un près de l’autre. Le silence s’installe. Judas ne dit rien. Il lève les yeux vers Jésus. Il lutte.

       Jésus veut l’aider. Il le regarde avec douceur, d’un air pénétrant.

       « Quelle belle nuit, Judas ! Vois comme tout est pur ! Je crois que la première nuit qui a ri sur la terre et sur le sommeil d’Adam au paradis terrestre ne l’était pas davantage. Sens le parfum de ces fleurs, respire, mais ne les cueille pas. Elles sont si belles et si pures ! Je m’en suis abstenu, moi aussi, parce que les cueillir, c’est les profaner. Il est toujours mal d’user de violence, pour la plante comme pour l’animal, pour l’animal comme pour l’homme. Pourquoi enlever la vie ? Elle est si belle quand elle est bien employée !… Et ces fleurs l’emploient bien, car elles exhalent leur parfum, réjouissent par leur aspect et leur odeur, donnent du miel aux abeilles et aux papillons, et leur cède l’or de leur pistil pour mettre de petites gouttes de topaze sur la perle de leurs ailes, et servent de lit aux nids… Si tu avais été là il y a un instant, tu aurais entendu un rossignol chanter doucement sa joie de vivre et de louer le Seigneur. Chers oiseaux ! Quel exemple pour les hommes ! Ils se contentent de peu, et seulement de ce qui est permis et saint : un grain et un petit ver, car c’est le Père Créateur qui le leur a donné. Et s’ils n’en ont pas, ils n’éprouvent ni colère ni dépit, mais ils trompent la faim de leur chair par le trop-plein de leur cœur qui leur fait chanter les louanges du Seigneur et les joies de l’espérance. Ils sont heureux d’être fatigués d’avoir voleté de l’aube jusqu’au soir pour se faire un nid tiède, douillet, sûr, non par égoïsme, mais par amour pour leurs petits. Et ils chantent de la joie de s’aimer honnêtement, le rossignol pour sa compagne et tous les deux pour leurs oisillons. Les animaux sont toujours heureux, car ils n’éprouvent pas de remords, leur cœur ne leur reproche rien. C’est nous qui les rendons malheureux parce que l’homme est mauvais, sans respect, dominateur, cruel. Et il ne lui suffit pas de l’être envers ses semblables, sa malveillance se déverse sur les êtres inférieurs. Plus il a en lui de remords, plus sa conscience le tarabuste, et plus il exerce sa méchanceté sur les autres. Je suis certain qu’il n’avait pas l’âme tranquille, ce cavalier qui, aujourd’hui, éperonnait jusqu’au sang son cheval tout en sueur, épuisé, et le cravachait jusqu’à lui faire dresser le poil sur le cou, sur les flancs, et jusque sur ses naseaux et sur ses sombres paupières qui se fermaient douloureusement sur ses yeux si résignés et si doux : soit il allait commettre un crime contre l’honnêteté, soit il venait d’en faire un. »

       Jésus se tait et pense.

       468.4 Judas lui aussi, garde le silence. Il réfléchit. Puis il dit :

       « Comme c’est beau, Maître, de t’entendre parler ainsi ! Tout devient clair aux yeux, à l’esprit, au cœur… et tout redevient facile, même de dire : “ Je veux être bon ! ” Même de te dire… même de te dire… de te dire : “ Maître, moi aussi j’ai l’âme troublée ! N’aie pas de dégoût pour moi, Maître, toi qui aimes celui qui est pur ! ”

       – Oh ! mon Judas ! Moi, du dégoût ? Mon ami, mon fils, qu’est-ce qui te trouble ?

       – Garde-moi avec toi, Maître. Tiens-moi serré contre toi… J’ai juré d’être bon depuis que tu m’as parlé si doucement. J’ai juré de redevenir le Judas des premiers jours, quand je te suivais et que je t’aimais comme un époux aime son épouse, quand je ne rêvais qu’à toi, trouvant en toi toute satisfaction. C’est ainsi que je t’aimais, Jésus…

       – Je le sais… et c’est pour cela que je t’ai aimé… Mais je t’aime encore, mon pauvre ami blessé…

       – Comment sais-tu que je le suis ? Sais-tu de quoi ?… »

       Silence. Jésus porte sur Judas un regard si doux… On dirait qu’une larme rend ses yeux plus larges et encore plus doux en tempérant leur éclat : c’est un regard d’enfant innocent et désarmé, qui se donne tout entier dans l’amour.

       Judas glisse à ses pieds, le visage sur ses genoux, les bras serrés à ses côtés et il gémit :

       « Garde-moi avec toi, Maître… Garde-moi… Ma chair hurle comme un démon… et, si je cède, tout le mal survient… Je sais que tu sais et que pourtant tu attends que je te l’avoue… Mais, Maître, il est difficile de dire : “ J’ai péché. ”

       – Je le sais, mon ami. C’est pour cela qu’il faudrait agir bien, pour ne pas devoir s’humilier en reconnaissant : “ J’ai péché. ” Pourtant, Judas, il y a en cela un grand remède : devoir faire effort pour avouer sa faute retient de la commettre et, si elle est déjà accomplie, la peine de s’accuser est déjà une pénitence qui rachète. Ensuite, si on souffre, non pas tant par orgueil ni par peur du châtiment, mais parce qu’on sait qu’en péchant on a causé de la douleur, alors, c’est moi qui le dis, la faute disparaît. C’est l’amour qui sauve.

       – Moi, je t’aime, Maître, mais je suis si faible… Ah ! Tu ne peux pas m’aimer ! Toi, tu es pur et tu aimes les purs… Tu ne peux pas m’aimer parce que je suis… je suis… 468.5 Oh ! Jésus, enlève-moi l’appétit des sens ! Tu sais quel démon c’est ?

       – Je le sais. Je ne l’ai pas exaucé, mais je sais quelle voix il a.

       – Tu le vois ? Tu le vois ? Tu en as un tel dégoût qu’il te suffit de le dire pour que ton visage soit bouleversé… Oh ! Tu ne peux pas me pardonner !

       – Judas… tu ne te rappelles donc pas Marie ? Matthieu ? Et ce publicain devenu lépreux ? Ou encore cette femme, courtisane romaine, à laquelle j’ai prophétisé une place dans le Ciel parce que, après mon pardon, elle allait avoir la force de vivre saintement ?

       – Maître… Maître… Maître… Quel mal j’ai au fond du cœur ! Ce soir, j’ai fui… j’ai fui Chorazeïn… car si j’étais resté… si j’étais resté… j’étais perdu. Tu sais… c’est comme l’homme qui boit à s’en rendre malade… Le médecin enlève le vin et toute boisson enivrante. Une fois guéri, il reste en bonne santé tant qu’il ne sent plus ce goût… Mais s’il cède, une seule fois, et en retrouve la saveur… il lui vient une soif… une soif de cette boisson telle, qu’il ne peut plus résister… Alors il boit comme un trou… Et il est de nouveau malade… malade pour toujours… fou… possédé… possédé par son démon… par son démon… Oh ! Jésus, Jésus, Jésus !… N’en parle pas aux autres… Ne leur dis rien… J’ai honte devant tous…

       – Mais pas devant moi. »

       Judas comprend de travers.

       « C’est vrai ! Pardon ! Je devrais être plus honteux devant toi que devant tout autre, car tu es parfait…

       – Non, mon fils, ce n’est pas ce que je disais. Que ta douleur, ton angoisse, ton humiliation ne te cachent pas la vérité. J’ai dit que tu peux être honteux devant tous, mais pas devant moi. Un enfant n’éprouve ni peur ni honte devant un bon père, pas plus qu’un malade devant un médecin compétent. Et à l’un comme à l’autre, il fait son aveu sans crainte, puisque l’un aime et pardonne, et que l’autre comprend et guérit. Moi, je t’aime et te comprends, aussi je te pardonne et je te guéris. Mais dis-moi, Judas : qu’est-ce qui te livre à ton démon ? Moi ? Tes frères ? Les femmes débauchées ? Non. C’est ta volonté. Maintenant, je te pardonne et te guéris… Quelle joie tu m’as faite, mon Judas ! Je me réjouissais déjà beaucoup de cette nuit sereine, parfumée, que les chants rendaient joyeuse, et j’en louais le Seigneur. Mais maintenant le bonheur que tu me fais surpasse ce clair de lune, ces parfums, cette paix, ces chants. Entends-tu ? Le rossignol semble s’y unir pour te dire avec moi combien il se réjouit de ta bonne volonté, lui, le petit chanteur, si plein de bonne volonté pour faire ce pour quoi il a été créé. Et aussi cette première brise du matin, qui passe sur les fleurs et les éveille, en faisant glisser dans le creux de leur calice un diamant de rosée : le papillon et le rayon de soleil le trouveront bientôt, et l’un s’en désaltèrera, l’autre s’en fera un miroir, minuscule pour son grand éclat. Regarde : la lune est sur le point de se coucher. L’aube s’annonce, avec ce chant lointain du coq. Les ténèbres nocturnes et les fantômes de la nuit disparaissent. Tu vois comme le temps qui, si tu n’étais pas venu à moi, serait passé dans le dégoût et le remords, s’est écoulé rapidement et dans la douceur ? Viens toujours quand tu as peur de toi. Le moi est tout à la fois un grand ami, un grand tentateur, un grand ennemi, et un grand juge, Judas ! Et, vois-tu ? Alors qu’il est un ami sincère et fidèle si tu as été bon, il sait être un ami sans sincérité si tu n’es pas bon et, après avoir été pour toi un complice, il s’élève au rang de juge inexorable et te torture par ses reproches… Or ses reproches à lui sont féroces… pas les miens ! 468.6 Eh bien, allons, la nuit est passée…

       – Maître, je ne t’ai pas laissé te reposer… et aujourd’hui, tu devras longuement parler…

       – Ce qui m’a reposé, c’est la joie que tu m’as donnée. Je n’ai pas de meilleur repos que celui de dire : “ Aujourd’hui, j’ai sauvé un homme qui périssait. ” Viens, viens… Descendons à Chorazeïn ! Ah ! si cette ville savait t’imiter, Judas !

       – Maître… que diras-tu à mes compagnons ?

       – Rien s’ils ne posent pas de question… S’ils m’interrogent, je dirai que nous avons parlé des miséricordes de Dieu… C’est un vrai sujet, et tellement illimité que la plus longue vie ne suffit pas à le développer. Allons… »

       Et ils descendent, grands, d’une beauté différente mais également jeunes, l’un près de l’autre, puis ils disparaissent derrière un bouquet d’arbres…

Enseignement de Jésus à Maria Valtorta

       468.7 Jésus dit :

       « C’est un épisode de miséricorde comme ceux de Marie-Madeleine. Mais si vous faites un livre, il vaudra mieux mettre les événements à la suite, dans l’ordre chronologique plutôt que par catégories, en vous limitant à préciser, au début ou dans un renvoi, à quelle catégorie appartient chaque épisode.

       Pourquoi ai-je mis en lumière la figure de Judas ? Plusieurs se le demanderont.

       Je réponds : la figure de Judas a été trop déformée au cours des siècles. Et, ces derniers temps, elle a été complètement dénaturée. Dans certaines écoles, on a fait presque son apothéose comme s’il était l’artisan secondaire et indispensable de la Rédemption.

       Beaucoup, ensuite, pensent qu’il a succombé à un assaut imprévu, féroce, du Tentateur. Non : toute chute a sa préparation dans le temps. Plus la chute est grave, mieux elle a été préparée. Les antécédents expliquent le fait. On ne dégringole pas à l’improviste et on ne s’élève pas de même, ni dans le mal, ni dans le bien. Il y a des causes longues et insidieuses aux descentes, et patientes et saintes aux montées.

       Le drame malheureux de Judas peut être d’un grand enseignement pour vous guérir, et connaître la méthode de Dieu et ses miséricordes pour absoudre et sauver ceux qui descendent vers l’Abîme.

       On n’arrive pas au délire satanique, où tu as vu Judas se débattre après son Crime, si on n’est pas totalement corrompu par des habitudes infernales recherchées des années durant avec volupté. Quand une personne, entraînée par un événement imprévu qui trouble sa raison, va jusqu’à accomplir un crime, elle souffre, mais elle sait expier, car il y a encore des parties de son cœur qui sont indemnes du poison diabolique.

       Au monde qui nie Satan, parce qu’il l’a tellement en lui-même qu’il n’en a plus conscience, qu’il l’a aspiré comme faisant partie de son moi, je démontre l’existence de Satan et la méthode éternelle, immuable, qu’il met en œuvre pour faire de vous ses victimes.

       C’est tout pour l’instant. Repose-toi dans ma paix. »

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