Une initative de
Marie de Nazareth

Jésus travaille comme menuisier pour une veuve de Chorazeïn

vendredi 28 juillet 28
Chorazeïn

Vision de Maria Valtorta

       267.1 Jésus travaille de bon cœur dans un établi de menuisier. Il est en train de finir une roue.

       Un enfant, maigrichon et triste, l’aide en lui apportant une chose ou l’autre. Manahen, témoin inutile mais admirateur, est assis sur un banc près du mur.

       Jésus a enlevé son beau vêtement de lin et en a revêtu un foncé qui, n’étant pas le sien, lui arrive à mi-jambes. C’est un habit de travail, propre mais ravaudé, sans doute celui du menuisier mort. Jésus encourage l’enfant par des sourires et de bonnes paroles, et il lui apprend comment faire pour amener la colle au point juste, pour faire briller les parois du coffre.

       « Tu as vite fait de le finir, Maître, dit Manahen en se levant et en passant le doigt sur les moulures du coffre terminé que l’enfant fait briller avec un liquide.

       – Il était presque fini…

       – Je voudrais bien avoir ce travail fait de tes mains, mais l’acheteur est déjà venu, et il semble avoir des droits… Tu l’as déçu. Il espérait pouvoir tout prendre pour compenser les quelques deniers qu’il avait avancés. Au lieu de quoi il prend ses objets et c’est tout. Si au moins il croyait en toi, ils auraient une valeur infinie pour lui. Mais tu as entendu ?…

       – Laisse-le faire. 267.2 D’ailleurs, il y a du bois ici et la femme sera très heureuse qu’on l’emploie pour en tirer profit. Commande-moi un coffre, et je te le fabriquerai…

       – Vraiment, Maître ? Mais tu as l’intention de travailler encore ?

       – Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de bois. Je suis un ouvrier consciencieux, dit-il en souriant plus ouvertement.

       – Un coffre fait de tes mains ! Ah, quelle relique ! Mais que mettrai-je dedans ?

       – Tout ce que tu veux, Manahen. Ce ne sera qu’un coffre.

       – Mais c’est toi qui l’auras fait !

       – Et alors ? Le Père lui aussi a fait l’homme, il a fait tous les hommes. Et pourtant, qu’est-ce que l’homme a mis en lui et qu’y mettent les hommes ? »

       Jésus parle et travaille, cherchant çà et là les outils dont il a besoin, serrant l’étau, vrillant, rabotant, tournant, selon ses besoins.

       « C’est le péché que nous y avons mis. C’est vrai.

       – Tu vois bien ! Or, tu peux en être sûr, l’homme créé par Dieu a beaucoup plus de valeur qu’un coffre fabriqué par moi. Ne confonds jamais l’objet et l’action. Fais de mon travail une relique pour ton âme seulement.

       – Que veux-tu dire ?

       – En d’autres termes, donne à ton âme l’enseignement que tu tires de ce que je fais.

       – Ta charité, ton humilité, ton activité, alors… Ces vertus, n’est-ce pas ?

       – Oui, et fais de même à l’avenir.

       – Oui, Maître. Mais tu me le fabriques, ce coffre ?

       – Je te le fabrique. Mais attention : puisque tu y vois toujours une relique, je te le ferai payer comme tel. Au moins une fois, on pourra dire que j’aurai été moi aussi avide d’argent… Mais tu sais pour qui est cet argent… Pour ces orphelins…

       – Demande-moi ce que tu veux, je te le donnerai. J’aurai du moins une excuse pour mon oisiveté, alors que toi, le Fils de Dieu, tu travailles.

       267.3 – Il est dit : “ Tu mangeras ton pain arrosé par la sueur de ton front. ”

       – Mais c’est dit pour l’homme coupable. Pas pour toi !

       – Oh ! Un jour je serai le Coupable et j’aurai sur moi tous les péchés du monde. Je les emporterai avec moi à mon premier départ.

       – Et crois-tu que le monde ne péchera plus ?

       – Il le devrait… Mais il péchera toujours. A cause de cela, le poids que j’aurai sur moi sera tel qu’il me brisera le cœur. Car j’aurai tous les péchés commis depuis Adam jusqu’à aujourd’hui, et d’aujourd’hui à la fin des siècles. J’expierai tous les péchés des hommes.

       – Et l’homme ne te comprendra et ne t’aimera pas encore… Crois-tu que Chorazeïn se convertira par cet enseignement silencieux et saint que tu es en train de donner par ton travail, accompli pour secourir une famille ?

       – Non. Elle dira : “ Il a préféré travailler pour passer le temps et gagner de l’argent. ” Mais moi, je n’avais plus d’argent. J’avais tout donné. Je donne toujours tout ce que je possède jusqu’au dernier sou, et j’ai travaillé pour donner de l’argent.

       – Et pour que Matthieu et toi mangiez ?

       – Dieu y aurait pourvu.

       – Mais tu nous as donné à manger.

       – C’est vrai.

       – Comment as-tu fait ?

       – Demande-le au maître de maison.

       – Je le lui demanderai certainement dès notre retour à Capharnaüm. »

       Jésus rit paisiblement dans sa barbe blonde.

       267.4 Un silence pendant lequel on n’entend que le grincement de l’étau serré sur deux pièces d’une roue.

       Puis Manahen demande :

       « Que comptes-tu faire avant le sabbat ?

       – Aller à Capharnaüm attendre les apôtres. Il est convenu de nous réunir chaque vendredi soir et de rester ensemble tout le sabbat. Puis je donnerai les ordres. Et si Matthieu est guéri, il y aura six couples pour évangéliser. Sinon… Veux-tu y aller avec eux ?

       – Je préfère rester avec toi, Maître… Me laisses-tu néanmoins te donner un conseil ?

       – Parle. S’il est juste, je l’accepterai.

       – Ne reste jamais tout seul. Tu as beaucoup d’ennemis, Maître.

       – Je le sais. Mais crois-tu que les apôtres feraient grand-chose en cas de danger ?

       – Ils t’aiment, je crois.

       – Certainement, mais ce serait inutile. Si mes ennemis avaient l’idée de s’emparer de moi, ils viendraient avec des forces beaucoup plus grandes que celles des apôtres.

       – Peu importe : ne reste pas seul.

       – Dans deux semaines, je serai rejoint par de nombreux di­s­ciples. Je les prépare pour les envoyer eux aussi évangéliser. Je ne serai plus seul. Sois tranquille. »

       Pendant qu’ils parlent ainsi, de nombreux curieux de Chorazeïn viennent jeter un coup d’œil, puis repartent sans rien dire.

       « Ils sont étonnés de te voir au travail.

       – Oui. Mais ils ne savent pas être humbles au point de dire : “ Il nous fait ainsi la leçon. ” Les meilleurs que j’avais ici sont avec les disciples, sauf un vieillard qui est mort. Peu importe. La leçon est toujours une leçon.

       – Que diront les apôtres quand ils sauront que tu fais l’ouvrier ?

       – Ils sont onze, car Matthieu s’est déjà prononcé. Il y aura onze avis différents et pour la plupart opposés. Mais cela me servira pour les instruire.

       – Me permets-tu d’assister à ton instruction ?

       – Si tu veux rester…

       – Mais je suis un disciple, et eux des apôtres !

       – Ce qui fera du bien aux apôtres sera utile aussi au disciple.

       – Ils seront gênés d’être rappelés à la justice en ma présence.

       – Ce sera bon pour leur humilité. Reste, reste, Manahen. Je te garde volontiers avec moi.

       – Et moi, je reste volontiers. »

       267.5 La veuve apparaît et dit :

       « Le repas est prêt, Maître. Mais tu travailles trop…

       – Je gagne mon pain, femme. Et puis… Voici un autre client. Il veut un coffre, lui aussi. Et il paie bien. L’emplacement du bois restera vide » dit Jésus en enlevant le tablier déchiré qu’il avait sur lui et en sortant de la pièce pour se laver à une bassine que la femme lui a apportée dans le jardin.

       Avec un de ces sourires indécis qui affleurent après une longue période de pleurs, elle dit :

       « Si l’emplacement du bois est vide, la maison est remplie de ta présence et mon cœur plein de paix. Je n’ai plus peur du lendemain, Maître. Et toi, n’aie pas peur que nous puissions t’oublier. »

       Ils entrent dans la cuisine et la vision prend fin.

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