Une initative de
Marie de Nazareth

Dans la maison de Jacob près du lac Mérom

dimanche 26 septembre 27
Lac Mérom

Vision de Maria Valtorta

       110.1 Je dirais que, en plus du lac de Galilée et de la mer Morte, la Palestine possède un autre petit lac ou étang, un miroir d’eau en somme, dont j’ignore le nom.

       Je ne vaux rien en fait d’évaluations, mais, à vue d’œil, je dirais que ce petit plan d’eau peut mesurer trois kilomètres sur deux environ. C’est peu, bien peu de chose, comme on le voit. Mais il est gracieux, dans son cadre de verdure. C’est un miroir si bleu et si serein qu’on dirait une grande écaille d’émail bleu, que veine au centre une coloration plus claire et légèrement mouvante, due sans doute au courant du fleuve qui s’y jette au nord pour en sortir au sud. A cause de la faible profondeur du lac, le courant ne se divise pas, mais il le traverse comme une veine vivante au milieu d’une eau stagnante, faisant remarquer sa présence par une couleur différente et une légère agitation de ses eaux.

       Pas de bateaux à voile sur ce petit lac, mais seulement quelques petites barques à rames d’où un pêcheur solitaire descend ou retire ses nasses, ou qu’emprunte quelque voyageur pour raccourcir sa route. Et des troupeaux, des troupeaux, encore des troupeaux qui descendent certainement des pâturages de montagne à cause de l’automne qui avance, et paissent sur ces rives dans les prés où l’herbe est verte et grasse.

       110.2 A la pointe sud du lac (dont la forme est ovale), passe une grande route qui s’allonge d’est en ouest, ou plutôt du nord-est au sud-ouest. Elle est assez bien entretenue et très fréquentée par des voyageurs qui se rendent dans les villages disséminés dans la région. C’est sur cette route que Jésus s’avance avec les siens.

       La journée est plutôt grise et Pierre déclare :

       « Il aurait mieux valu ne pas aller chez cette femme. Les jours deviennent de plus en plus courts et sombres… et Jérusalem est encore loin.

       – Nous arriverons à temps. Crois-moi, Pierre, il vaut mieux obéir à Dieu en faisant le bien que d’assister à une cérémonie extérieure. Maintenant, cette femme bénit Dieu avec tous ses enfants, autour du chef de famille qui est si bien guéri qu’il pourra se trouver à Jérusalem pour la fête des Tentes, alors qu’il aurait dû, à ce moment-là, reposer dans un tombeau sous les bandelettes et au milieu des aromates. Ne confondez jamais la foi avec les actes extérieurs. Il ne faut jamais critiquer. Mais comment les pharisiens peuvent-ils t’étonner si, toi-même, tu t’illusionnes avec une piété mal comprise, et si tu fermes ton cœur au prochain en disant : “ Je sers Dieu. Cela suffit ” ?

       – Tu as raison, Maître. Je suis plus ignorant qu’un ânon.

       – Et je te garde avec moi pour te rendre sage. N’aie pas peur. Kouza m’a offert un char presque jusqu’à Jaboc. De là au gué, le chemin est court. Il a tant insisté, et avec des raisons si justes, que j’ai cédé, bien que je juge que le Roi des pauvres doive se servir des moyens des pauvres. Mais la mort de Jonas nous a retardés et je dois adapter mes plans à l’imprévu. »

       110.3 Les disciples parlent de Jonas en plaignant sa misérable existence et en enviant son heureuse mort. Simon le Zélote murmure :

       « Je n’ai pas pu le rendre heureux et donner au Maître un vrai disciple mûri par un long martyre et une foi inébranlable… et j’en suis peiné. Le monde a tant besoin de personnes fidèles, pleines de foi en Jésus, pour compenser ceux, si nombreux, qui nient et nieront !

       – Peu importe, Simon, répond Jésus. Il est plus heureux aujourd’hui, et plus actif. Et toi, tu as fait davantage pour lui et pour moi que nul autre à ta place. Pour lui aussi, je te remercie. Maintenant, il sait qui a été son libérateur et il te bénit.

       – Alors, il maudit Doras, aussi » s’exclame Pierre.

       Jésus le regarde et lui demande :

       « Tu crois cela ? Tu es dans l’erreur. Jonas était un juste. Maintenant, c’est un saint. Il n’a haï et maudit personne de son vivant. Il ne hait et ne maudit pas maintenant. Dans le lieu où il séjourne, il regarde vers le Paradis et jubile, car il sait déjà que bientôt les limbes laisseront sortir ceux qui s’y trouvent. Il ne fait rien d’autre.

       – Et pour ce qui est de Doras… ton anathème agira ?

       – Dans quel sens, Pierre ?

       – En l’amenant à réfléchir et à changer… ou bien… en le frappant de quelque châtiment.

       – Je l’ai livré à la Justice de Dieu. Moi, l’Amour, je l’ai abandonné.

       – Miséricorde ! Je ne voudrais pas être à sa place !

       – Moi, non plus !

       – Ni moi !

       – Personne ne le voudrait, car que sera donc la justice du Parfait ? disent les disciples.

       – Pour les bons, ce sera l’extase, pour les satans, ce sera la foudre, mes amis. En vérité je vous le dis : être toute la vie esclave, lépreux, mendiant, est un bonheur royal en comparaison d’une heure, d’une seule heure de punition divine.

       110.4 – Il pleut, Maître. Qu’allons-nous faire ? Où aller ? »

       En effet, sur le lac assombri sous un ciel maintenant tout couvert de nuages couleur de plomb, tombent et rebondissent les premières gouttes d’une pluie qui menace de devenir plus violente.

       « Dans quelque maison, nous demanderons abri au nom de Dieu.

       – Espérons que nous trouverons des gens aussi bons que ce Romain. Je ne les croyais pas comme ça… Je les avais toujours évités comme impurs, et je vois que… oui, tout compte fait, ils valent mieux que beaucoup d’entre nous, dit Pierre.

       – Les Romains te plaisent ? demande Jésus.

       – Eh bien… je ne les trouve pas pires que nous. Seulement, ce sont des samaritains… »

       Jésus sourit sans rien dire.

       Ils sont rejoints par une petite femme qui pousse devant elle huit brebis.

       « Femme, sais-tu où nous pourrons trouver un toit ?… demande Pierre.

       – Je suis la servante d’un homme pauvre et seul. Mais si vous voulez venir… je crois que mon maître vous recevra avec bonté.

       – Allons-y. »

       Ils se hâtent sous l’averse au milieu des brebis au corps obèse qui trottent pour fuir la pluie. Ils quittent la grand-route pour prendre un chemin qui mène à une maisonnette basse. Je reconnais la maison du paysan Jacob, ce Jacob de l’épisode de Matthias et Marie, les deux orphelins de la vision du mois d’août, me semble-t-il.

       « Voilà : c’est ici ! Courez devant, pendant que je mène les brebis au bercail. Au-delà du muret il y a une cour à passer pour arriver à la maison. Il doit être dans la cuisine. Ne faites pas attention s’il parle peu… Il a beaucoup d’ennuis. »

       La femme se dirige vers un cagibi à droite.

       110.5 Jésus et ses disciples tournent à gauche.

       Voilà l’aire avec le puits et le four au fond, le pommier de côté, et voici la porte grande ouverte de la cuisine où brûle un feu de branches, et où un homme est en train de réparer un outil de culture endommagé.

       « Paix à cette maison. Je te demande un abri pour la nuit pour mes compagnons et moi » dit Jésus sur le seuil de la porte.

       L’homme lève la tête.

       « Entre » dit-il « et que Dieu te rende la paix que tu donnes. Mais… parler de paix ici ! Elle est l’ennemie de Jacob, depuis quelque temps. Entre, entre !… Entrez tous. Le feu est l’unique chose que je puisse vous offrir en abondance… parce que… Oh ! Mais… Mais toi, maintenant que tu as enlevé le capuchon (Jésus s’était couvert la tête avec un pan de son manteau, en le tenant serré sous la gorge avec la main) et que je te vois bien… Tu es, oui, tu es le Rabbi galiléen, celui qu’on nomme Messie et qui fait des miracles… Est-ce toi ? Dis-le, au nom de Dieu.

       – Je suis Jésus de Nazareth, le Messie. Tu me connais ?

       – A la dernière lune, je t’ai entendu parler chez Jude et Anne… j’étais au nombre des vendangeurs car… je suis pauvre… Une série de malheurs : la grêle, les chenilles, des arbres et des brebis malades… Pour moi, qui suis seul avec une servante, mes biens me suffisaient. Mais maintenant j’ai accumulé des dettes parce que le malheur s’acharne sur moi… Pour ne pas vendre toutes mes brebis, j’ai travaillé dans la maison des autres… Et puis, mes champs !… On aurait dit que la guerre y était passée tant ils étaient brûlés, et tant les vignes et les oliviers étaient stériles. Depuis la mort de ma femme, cela fait six ans, on dirait que Mammon s’amuse à mes dépens. Tu vois ? Je suis en train de travailler sur cette charrue. Mais le bois en est tout abîmé. Comment faire ? Je ne suis pas du métier, et j’attache, j’attache. Mais cela ne sert à rien. Il me faut aussi veiller à ma bourse, désormais… Je vais vendre une autre brebis pour réparer les outils. Le toit fait eau… mais les champs m’inquiètent plus que la maison. Quel dommage ! Les brebis sont toutes pleines… j’espérais reconstituer le troupeau… Mais voilà…

       – Je vois que je viens apporter des ennuis, là où il y en a déjà tant.

       – Des ennuis, toi ? Non. Je t’ai entendu parler et… tes paroles me sont restées au fond du cœur. C’est vrai que j’ai travaillé honnêtement, et pourtant… Mais je pense que je ne devais pas encore être assez bon. Je pense que celle qui était bonne, c’était peut-être ma femme qui avait pitié de tout le monde. Pauvre Lia, morte trop tôt, trop tôt pour son mari… Je pense que la prospérité de ces temps-là venait du Ciel grâce à elle. Et je veux devenir meilleur pour pratiquer ce que tu dis et imiter mon épouse. Je ne demande pas grand-chose : seulement de rester dans cette maison où elle est morte et où, moi, je suis né… et d’avoir du pain pour moi et pour la servante qui remplace ma femme, sert de bergère et m’aide comme elle le peut. Je n’ai plus de serviteur. J’en avais deux et ils me suffisaient, car je travaillais moi aussi aux champs et à l’oliveraie… Mais je n’ai plus de pain que pour moi, et encore bien peu…

       – Ne te prive pas de pain pour nous…

       – Non, Maître, même si je n’en avais qu’une bouchée, je te la donnerais. C’est un honneur pour moi de t’avoir… Je ne l’aurais jamais espéré. Mais je te parle de mes misères parce que tu es bon et que tu comprends.

       – Oui, je comprends. 110.6 Donne-moi ce marteau. Ce n’est pas comme ça qu’il faut faire. Tu abîmes le bois. Donne-moi aussi ce poinçon, mais après l’avoir rougi au feu. Il percera mieux le bois et nous y passerons sans difficulté une cheville de fer. Laisse-moi faire. J’étais menuisier…

       – Toi, travailler pour moi ? Non !

       – Laisse-moi faire. Tu me donnes l’hospitalité. Moi, je t’aide. Il faut s’aimer entre hommes, en donnant chacun ce qu’il peut.

       – Tu donnes la paix. Tu donnes la sagesse. Tu donnes des miracles. Tu donnes déjà beaucoup, beaucoup !

       – Je donne aussi le travail. Allez, obéis… »

       Jésus, qui n’a gardé que son habit, travaille rapidement et avec dextérité au timon abîmé. Il perce, attache, cheville, l’essaie jusqu’à ce qu’il le voie solide.

       « Il pourra encore servir longtemps, jusqu’à l’année prochaine. Tu pourras le changer à ce moment-là.

       – Je le crois bien. Cette charrue est passée par tes mains et me bénira la terre.

       – Ce n’est pas la raison pour laquelle elle sera bénie, Jacob.

       – Pourquoi, alors, mon Seigneur ?

       – Parce que tu fais preuve de miséricorde. Tu ne te renfermes pas dans la rancœur de l’égoïsme et de l’envie, mais tu reçois mon enseignement et le mets en pratique. Bienheureux les miséricordieux. Ils obtiendront miséricorde.

       – En quoi est-ce que j’en fais preuve pour toi, mon Seigneur ? C’est à peine si j’ai une place et la nourriture dont tu as besoin. Je n’ai que de la bonne volonté, et jamais je n’ai tant souffert d’être pauvre pour n’avoir pas de quoi vous faire honneur, à toi et à tes amis.

       – Ton désir suffit. En vérité, je te dis que même un seul verre d’eau donné en mon nom est une grande chose aux yeux de Dieu. J’étais un voyageur fatigué sous la bourrasque : tu m’as abrité. L’heure du repas arrive et tu me dis : “ Je t’offre ce que j’ai. ” La nuit tombe, et tu m’offres un toit ami. Que veux-tu faire de plus ? Fais confiance, Jacob. Le Fils de l’homme ne fait pas attention au luxe de la réception et de la nourriture. Il regarde les sentiments du cœur. Le Fils de Dieu dit au Père : “ Père, bénis mes bienfaiteurs et tous ceux qui, en mon nom, sont miséricordieux pour leurs frères. ” Cela, je le dis pour toi. »

       110.7 Pendant que Jésus travaillait à la herse, la servante a parlé avec le maître, et elle revient avec du pain, du lait qu’elle vient de traire, quelques pommes ratatinées et un plateau d’olives.

       « Je n’ai rien d’autre, dit l’homme en s’excusant.

       – Moi, je vois parmi ta nourriture une nourriture que tu ne vois pas ! Et je m’en nourris, car elle a une saveur céleste.

       – Tu te nourris, peut-être, toi, Fils de Dieu, d’une nourriture que t’apportent les anges ? Peut-être vis-tu d’un pain spirituel.

       – Oui, l’âme a plus de valeur que le corps, et pas seulement en moi. Mais je ne me nourris pas de pain angélique, bien plutôt de l’amour du Père et des hommes. Je le trouve aussi sur ta table, et j’en bénis le Père qui par amour m’a conduit à toi, et je te bénis de m’accueillir avec amour et de me donner l’amour. Voilà ma nourriture : que la volonté de mon Père soit faite.

       – Alors bénis cette nourriture et fais-en l’offrande à Dieu à ma place. Aujourd’hui, tu es pour moi le chef de famille et toujours tu seras mon Maître et mon Ami. »

       Jésus prend le pain et l’offre en le tenant haut levé entre ses mains. Il prie, avec un psaume, je crois. Puis il s’assied, rompt le pain et le distribue…

       Tout se termine ainsi.

               

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