Une initative de
Marie de Nazareth

Le levain des pharisiens

mercredi 23 mai 29
Jourdain
James Tissot

Dans les évangiles : Mt 16,5-12 ; Mc 8,14-21 ; Lc 12,1-12

Matthieu 16,5-12

En se rendant sur l’autre rive, les disciples avaient oublié d’emporter des pains. Jésus leur dit : « Attention ! Méfiez-vous du levain des pharisiens et des sadducéens. » Ils discutaient entre eux en disant : « C’est parce que nous n’avons pas pris de pains. » Mais Jésus s’en rendit compte et leur dit : « Hommes de peu de foi, pourquoi discutez-vous entre vous sur ce manque de pains ? Vous ne comprenez pas encore ? Ne vous rappelez-vous pas les cinq pains pour cinq mille personnes et combien de paniers vous avez emportés ? Les sept pains pour quatre mille personnes et combien de corbeilles vous avez emportées ? Comment ne comprenez-vous pas que je ne parlais pas du pain ? Méfiez-vous donc du levain des pharisiens et des sadducéens. » Alors ils comprirent qu’il ne leur avait pas dit de se méfier du levain pour le pain, mais de l’enseignement des pharisiens et des sadducéens.

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Marc 8,14-21

Les disciples avaient oublié d’emporter des pains ; ils n’avaient qu’un seul pain avec eux dans la barque. Or Jésus leur faisait cette recommandation : « Attention ! Prenez garde au levain des pharisiens et au levain d’Hérode ! » Mais ils discutaient entre eux sur ce manque de pains. Jésus s’en rend compte et leur dit : « Pourquoi discutez-vous sur ce manque de pains ? Vous ne saisissez pas ? Vous ne comprenez pas encore ? Vous avez le cœur endurci ? Vous avez des yeux et vous ne voyez pas, vous avez des oreilles et vous n’entendez pas ! Vous ne vous rappelez pas ? Quand j’ai rompu les cinq pains pour cinq mille personnes, combien avez-vous ramassé de paniers pleins de morceaux ? » Ils lui répondirent : « Douze. – Et quand j’en ai rompu sept pour quatre mille, combien avez-vous rempli de corbeilles en ramassant les morceaux ? » Ils lui répondirent : « Sept. » Il leur disait : « Vous ne comprenez pas encore ? »

Luc 12,1-12

Comme la foule s’était rassemblée par milliers au point qu’on s’écrasait, Jésus, s’adressant d’abord à ses disciples, se mit à dire : « Méfiez-vous du levain des pharisiens, c’est-à-dire de leur hypocrisie. Tout ce qui est couvert d’un voile sera dévoilé, tout ce qui est caché sera connu. Aussi tout ce que vous aurez dit dans les ténèbres sera entendu en pleine lumière, ce que vous aurez dit à l’oreille dans le fond de la maison sera proclamé sur les toits. Je vous le dis, à vous mes amis : Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, et après cela ne peuvent rien faire de plus. Je vais vous montrer qui vous devez craindre : craignez celui qui, après avoir tué, a le pouvoir d’envoyer dans la géhenne. Oui, je vous le dis : c’est celui-là que vous devez craindre. Est-ce que l’on ne vend pas cinq moineaux pour deux sous ? Or pas un seul n’est oublié au regard de Dieu. À plus forte raison les cheveux de votre tête sont tous comptés. Soyez sans crainte : vous valez plus qu’une multitude de moineaux.

Je vous le dis : Quiconque se sera déclaré pour moi devant les hommes, le Fils de l’homme aussi se déclarera pour lui devant les anges de Dieu. Mais celui qui m’aura renié en face des hommes sera renié à son tour en face des anges de Dieu.

Quiconque dira une parole contre le Fils de l’homme, cela lui sera pardonné ; mais si quelqu’un blasphème contre l’Esprit Saint, cela ne lui sera pas pardonné.

Quand on vous traduira devant les gens des synagogues, les magistrats et les autorités, ne vous inquiétez pas de la façon dont vous vous défendrez ni de ce que vous direz. Car l’Esprit Saint vous enseignera à cette heure-là ce qu’il faudra dire. »

Vision de Maria Valtorta

       421.1 Une fois passée la semaine sainte et par conséquent la pénitence de ne pas voir, revoilà ce matin la vision spirituelle de l’Evangile. Cette joie, qui s’annonce toujours par un indescriptible sentiment de jubilation surhumaine, me fait oublier toute mon anxiété…

       … Je vois Jésus cheminer encore le long des bosquets qui bordent le fleuve. Il s’arrête pour ordonner une halte en ces heures trop chaudes pour permettre la marche. Car, si l’entrelacement étroit des branches abrite du soleil, c’est aussi une chape qui fait obstacle au mouvement à peine sensible de la brise, de sorte que, au-dessous, l’air est chaud, immobile, lourd, d’une humidité qui se dégage du sol près du fleuve, une humidité qui ne détend pas, mais qui colle au corps en se mêlant à la transpiration, qui est déjà un tourment.

       « Arrêtons-nous jusqu’au soir. Ensuite, nous descendrons sur la grève qui blanchit sous la lumière des étoiles et nous reprendrons notre route de nuit. Maintenant, mangeons et reposons-nous.

       – Ah ! avant de manger, je vais me rafraîchir en prenant un bain. L’eau sera tiède comme une tisane pour la toux, mais cela servira à m’enlever la sueur. Qui vient avec moi ? » demande Pierre.

       Tous l’accompagnent, même Jésus qui, comme les autres, est en nage et a son vêtement alourdi par la poussière et la transpiration. Chacun d’eux prend un vêtement propre dans son sac, et ils descendent au fleuve. Il ne reste sur l’herbe, pour signaler leur halte, que les treize sacs et les gourdes que gardent les vieux arbres et d’innombrables oiseaux qui épient avec curiosité, de leurs petits yeux de jais, ces sacs gonflés et multicolores épars sur l’herbe.

       Les voix des baigneurs s’éloignent et se perdent dans le bruissement du fleuve. Seul, de temps à autre, quelque bruyant éclat de rire des plus jeunes résonne comme une note aiguë au-dessus des accords bas et monotones du fleuve.

       421.2 Mais le silence est bientôt rompu par un bruit de pas. Des têtes se montrent de derrière un enchevêtrement de branches, elles jettent un coup d’œil, disent avec un air de satisfaction :

       « Ils sont ici. Ils se sont arrêtés. Allons le dire aux autres. »

       Et ils disparaissent en s’éloignant derrière les buissons…

       … Pendant ce temps, rafraîchis, les cheveux encore humides, bien qu’essuyés sommairement, pieds nus, leurs sandales propres et ruisselantes tenues par les brides, des vêtements frais sur le dos — les autres sont peut-être étendus sur les roseaux après avoir été lavés dans les eaux bleues du Jourdain —, les apôtres reviennent avec le Maître. Ils sont visiblement plus en forme après ce bain prolongé.

       Ignorant qu’ils ont été découverts, ils s’asseyent, après que Jésus a offert et distribué la nourriture. Une fois le repas terminé, les apôtres, somnolents, voudraient bien s’allonger et faire la sieste, mais voilà qu’arrive un homme, et après lui un autre et un troisième…

       « Que voulez-vous ? » demande Jacques, fils de Zébédée, qui les voit venir et s’arrêter près d’un buisson, se demandant s’ils doivent avancer ou non.

       Les autres, y compris Jésus, se retournent pour voir avec qui parle Jacques.

       « Ah ! ce sont des habitants du village… Ils nous ont suivis ! » constate sans enthousiasme Thomas, qui se disposait à faire un petit somme.

       Cependant, les hommes interrogés par Jacques répondent, un peu intimidés devant la répugnance visible des apôtres à les recevoir :

       « Nous voulions parler au Maître… Dire que… N’est-ce pas, Samuel ?… »

       N’osant continuer, ils s’arrêtent.

       Mais Jésus, bienveillant, les encourage :

       « Parlez, parlez. Vous avez d’autres malades ?… »

       Et il se lève pour aller vers eux.

       « Maître, tu es fatigué toi aussi, plus que nous. Repose-toi un peu et qu’ils attendent…, disent plusieurs apôtres.

       – Il y a ici des personnes qui désirent me voir. Elles aussi n’ont donc pas leur cœur en paix. Or la fatigue du cœur est plus grave que celle des membres. Laissez-moi les écouter.

       – C’est bien ! Adieu notre repos !… » bougonnent les apôtres, abrutis par la fatigue et la chaleur au point de faire des reproches à leur Maître en présence d’étrangers :

       « Et quand, par défaut de prudence, tu nous auras rendus tous malades, tu comprendras trop tard que nous t’étions nécessaires. »

       Jésus les regarde… avec pitié. Il n’y a rien d’autre dans ses doux yeux fatigués… Mais il répond :

       « Non, mes amis. Je ne prétends pas que vous m’imitiez. Regardez : restez ici à vous reposer. Moi, je m’éloigne avec eux. Je vais les écouter puis je reviendrai me délasser parmi vous. »

       Sa réponse est si douce qu’elle opère mieux qu’un reproche. Le bon cœur, l’affection des Douze se réveille et reprend le dessus :

       « Mais non, Seigneur ! Reste où tu es pour leur parler. Nous irons retourner nos vêtements pour les faire sécher de l’autre côté. Ainsi, nous vaincrons le sommeil et puis nous viendrons nous reposer ensemble. »

       Les plus ensommeillés vont au fleuve… Il reste Matthieu, Jean et Barthélemy.

       421.3 Pendant ce temps, les trois citadins sont devenus plus de dix et il en arrive toujours…

       «  Alors ? Avancez et parlez sans crainte.

       – Maître, après ton départ, les pharisiens sont devenus encore plus violents… Ils ont assailli l’homme que tu as délivré et… s’il ne devient pas fou, ce sera un nouveau miracle… car… ils lui ont dit que… que tu l’as débarrassé d’un démon qui ne détenait que sa raison, mais que tu as mis en lui un démon plus fort. Ce démon serait puissant au point d’avoir vaincu le premier. Il le serait même davantage, parce qu’il damne et possède son âme. Alors qu’il n’aurait pas eu à porter les conséquences dans l’autre vie de sa première possession parce que ses actions n’étaient pas… comment ont-ils dit, Abraham ? …

       – Ils ont dit… un mot étrange… En somme, Dieu ne lui aurait pas demandé compte de ses actes parce ils étaient faits sans liberté d’esprit. En revanche, comme il adore aujourd’hui sous l’influence du démon que tu lui as mis dans le cœur, toi, le prince des démons — ah ! pardonne-nous de dire cela ! —, comme il t’adore avec un esprit qui n’est plus fou, il est sacrilège et maudit, donc il sera damné. Il s’ensuit que le pauvre malheureux regrette son premier état et en arrive presque… à faire des imprécations contre toi… Le voilà donc plus fou qu’auparavant… Sa mère est désespérée à la vue de son fils qui désespère de se sauver… et toute leur joie s’est changée en tourment. Nous t’avons cherché pour que tu lui apportes la paix, et c’est sûrement l’ange qui nous a conduits ici… Seigneur, nous croyons que tu es le Messie, et nous croyons que le Messie a en lui l’Esprit de Dieu, qu’il est donc Vérité et Sagesse. C’est pourquoi nous te demandons de nous donner la paix et l’explication…

       – Vous faites preuve de justice et de charité. Soyez bénis. Mais où est ce malheureux ?

       – Il nous suit avec sa mère en pleurant de désespoir. Tu vois ? Le village entier — sauf eux, les cruels pharisiens — vient ici, sans se soucier de leurs intimidations : ils nous ont en effet menacés de punitions à cause de notre foi en toi. Mais Dieu nous protégera.

       – Oui, Dieu vous protégera. Conduisez-moi au miraculé.

       – Non, c’est nous qui allons te l’amener. Attends. »

       Plusieurs se dirigent vers le groupe le plus nombreux, qui s’avance en faisant de grands gestes, tandis que deux plaintes aiguës dominent la rumeur de la foule. Les autres, ceux qui sont restés, sont déjà nombreux et quand tous se réunissent avec au milieu le possédé guéri et sa mère, c’est vraiment une grande foule qui se presse sous les arbres autour de Jésus, grimpant même aux branches afin de trouver une place pour mieux entendre et voir.

       421.4 Jésus s’avance à la rencontre de son miraculé qui, à sa vue, s’agenouille en s’arrachant les cheveux et dit :

       « Rends-moi le premier démon ! Par pitié pour moi, pour mon âme ! Que t’ai-je fait pour que tu me nuises à ce point ? »

       Et sa mère, elle aussi à genoux :

       « Il délire de peur, Seigneur ! Ne tiens pas compte de ses paroles blasphématoires, mais délivre-le de la peur que ces cruels ont mise en lui, pour qu’il ne perde pas la vie de l’âme. Tu l’as libéré une fois !… Par pitié pour une mère, libère-le encore !

       – Oui, femme, n’aie pas peur ! Fils de Dieu, écoute ! »

       Jésus appuie ses mains sur la chevelure en désordre du malheureux que fait délirer une peur extravagante :

       « Ecoute et discerne par toi-même, puisque maintenant ton jugement est libre et que tu peux juger avec justice. Il y a une manière sûre de savoir si un prodige vient de Dieu ou du démon : c’est ce que l’âme éprouve. Si ce fait extraordinaire vient de Dieu, il déverse dans l’âme la paix et une joie pleine de majesté. S’il vient d’un démon, ce sont le trouble et la souffrance qui apparaissent avec ce prodige. Des paroles de Dieu viennent paix et joie, alors que celles d’un démon — que ce soit un démon esprit ou un démon homme —, ne suscitent que délire et tourment. De même, du voisinage de Dieu viennent douceur et allégresse, alors que le voisinage des esprits ou des hommes mauvais occasionne trouble et souffrance. Maintenant réfléchis, fils de Dieu. Quand, en cédant au démon de la luxure, tu as commencé à accueillir en toi ton oppresseur, jouissais-tu de la joie et de la paix ? »

       L’homme réfléchit, et en rougissant, il répond :

       « Non, Seigneur.

       – Et quand ton perpétuel Adversaire a pris totalement possession de toi, connaissais-tu la paix et la joie ?

       – Non, Seigneur, jamais. Tant que j’ai compris, tant que j’ai eu un reste de liberté d’esprit, il m’est venu trouble et souffrance de la violence de l’Adversaire. Ensuite… je ne sais pas… Je n’avais plus une intelligence capable de comprendre ce que je subissais… J’étais inférieur à une bête… Mais même dans cet état où je paraissais moins intelligent qu’un animal… comme je pouvais encore souffrir ! Je ne sais dire de quoi… L’enfer est terrible ! Ce n’est qu’horreur… et on ne peut dire ce que c’est… »

       L’homme tremble au simple souvenir de ses tortures de possédé, il pâlit, transpire… Sa mère l’enlace, lui donne un baiser sur la joue pour l’arracher à ce cauchemar… Les gens commentent à mi-voix.

       « Et quand tu t’es réveillé avec ta main dans la mienne ? Qu’as-tu éprouvé ?

       – Ah ! un étonnement si doux… et puis une joie, une paix plus grande encore… Il me semblait sortir d’une sombre prison remplie d’un grouillement de serpents innombrables et d’un air horriblement fétide et, en même temps, j’entrais dans un jardin fleuri, plein de soleil, de chants… J’ai connu le Paradis… mais lui aussi ne peut se décrire… »

       L’homme sourit, comme ravi par le souvenir de sa brève et récente heure de joie. Puis il soupire et achève :

       « Mais cela a été vite fini…

       – En es-tu sûr ? Dis-moi, maintenant que tu es à côté de moi et loin de ceux qui t’ont troublé, qu’éprouves-tu ?

       – La paix encore. Ici, près de toi, je ne puis croire que je suis damné, et leurs paroles me semblent être des blasphèmes… Mais moi, je les ai crues… N’ai-je donc pas péché contre toi ?

       – Ce n’est pas toi qui as péché, mais eux. Lève-toi, fils de Dieu, et crois à la paix qui est en toi. La paix vient de Dieu. Tu es avec Dieu. Ne pèche pas et ne crains pas. »

       Il retire les mains de dessus la tête de l’homme et le fait se lever.

       421.5 « C’est vraiment le cas, Seigneur ? demandent plusieurs.

       – Oui. Le doute suscité par des paroles intentionnellement nuisibles a été la dernière vengeance de Satan sorti de lui, vaincu, désireux de reprendre sa proie perdue. »

       Avec beaucoup de bon sens, un homme du peuple dit :

       « Mais alors… les pharisiens… ils ont servi Satan ! »

       Et beaucoup applaudissent cette juste observation.

       «  Ne jugez pas. Il y a quelqu’un qui le fait.

       – Du moins, notre jugement est sincère… et Dieu voit que nous jugeons des fautes évidentes. Eux feignent d’être ce qu’ils ne sont pas. Leurs actions sont mensongères et leurs intentions ne sont pas bonnes. Ils ont néanmoins davantage de succès que nous, qui sommes honnêtes et sincères. Ils sont notre terreur. Ils étendent leur puissance jusque sur la liberté de croyance. On doit croire et pratiquer comme cela leur plaît, et ils nous menacent parce que nous t’aimons. Ils essaient de ramener tes miracles à des sorcelleries, à inspirer la peur de toi. Ils conspirent, oppriment, nuisent… »

       421.6 La foule gronde. Jésus fait un geste pour imposer le silence :

       « N’accueillez pas dans votre cœur ce qui vient d’eux, ni leurs insinuations, ni leurs explications, et pas même l’idée : “ Ils sont méchants et pourtant ils triomphent. ” Ne vous rappelez-vous pas les paroles de la Sagesse : “ Bref est le triomphe des criminels ” et celles des Proverbes : “ Mon fils, ne suis pas l’exemple des pécheurs et n’écoute pas les paroles des impies, car ils sont pris dans les chaînes de leurs propres méfaits et trompés par leur grande sottise ” ? N’accueillez pas en vous ce qui vient de ceux que vous-mêmes, malgré votre imperfection, estimez injustes : vous feriez place au levain qui les corrompt. Or le levain des pharisiens, c’est l’hypocrisie. Qu’elle n’existe jamais chez vous, ni à l’égard des formes du culte rendu à Dieu, ni dans vos relations avec vos frères. Gardez-vous du levain des pharisiens. Pensez qu’il n’est rien de secret qui ne puisse être découvert, rien de caché qui ne finisse par être connu.

       Vous le voyez : ils m’avaient laissé partir, puis ils ont semé la zizanie là où le Seigneur avait semé le bon grain. Ils croyaient avoir agi avec subtilité et être victorieux. Et il aurait suffi que vous ne m’ayez pas trouvé, que j’aie passé le fleuve sans laisser de traces sur l’eau qui reprend son aspect après que la proue l’a fendue, pour que triomphe leur mauvaise action, présentée sous un jour favorable. Mais leur jeu a vite été découvert et leur œuvre malfaisante neutralisée. Cela concerne tous les actes de l’homme.

       Mais il en est Un au moins qui les connaît et sait y parer : Dieu. Ce qui est dit dans l’obscurité finit par être dévoilé par la Lumière, ce que l’on ourdit dans le secret d’une chambre peut être découvert comme si on l’avait tramé sur une place publique. C’est que tout homme peut avoir un délateur. Tout homme est vu par Dieu, qui peut intervenir pour démasquer les coupables.

       421.7 Voilà pourquoi il faut toujours agir honnêtement pour vivre dans la paix. Et celui qui se conduit ainsi ne doit pas avoir peur, ni en cette vie, ni en l’autre. Non, mes amis, je vous le dis : que celui qui agit en juste ne craigne rien.

       Qu’il n’ait pas peur de ceux qui tuent, de ceux qui peuvent tuer le corps mais rien de plus. Voici plutôt ce que vous devez craindre : craignez ceux qui, après vous avoir fait mourir, peuvent vous envoyer en enfer, c’est-à-dire les vices, les mauvais compagnons, les faux maîtres, tous ceux qui vous insinuent le péché ou le doute dans le cœur, ceux qui, au-delà du corps, essaient de corrompre votre âme et de vous amener à vous séparer de Dieu et à désespérer de la miséricorde divine. C’est cela que vous devez redouter, je vous le répète, car alors vous serez morts pour l’éternité.

       Mais pour le reste, pour votre existence, ne craignez rien. Votre Père ne perd pas de vue un seul de ces petits oiseaux qui font leurs nids dans le feuillage des arbres, et aucun d’eux ne tombe dans le filet sans que son Créateur ne le sache. Pourtant, leur valeur matérielle est bien petite : cinq passereaux valent deux as. Quant à leur valeur spirituelle, elle est nulle. Malgré cela, Dieu s’en occupe. Comment donc ne prendrait-il pas soin de vous, de votre vie, de votre bien ? Le Père connaît même le nombre des cheveux de votre tête, et aucune injustice commise envers ses enfants ne passe inaperçue : vous êtes en effet ses enfants, et vous avez bien plus de valeur que les passereaux qui font leurs nids sur les toits et dans les feuillages.

       421.8 Et vous restez des enfants tant que vous ne renoncez pas vous-mêmes à l’être, par votre libre volonté. On renonce à cette filiation quand on renie Dieu, et le Verbe que Dieu a envoyé parmi les hommes pour les amener au Seigneur. Par conséquent, lorsque quelqu’un ne veut pas me reconnaître devant les hommes par crainte que cela lui porte tort, Dieu lui aussi ne le reconnaîtra pas pour son fils, et le Fils de Dieu et de l’homme ne le reconnaîtra pas devant les anges du Ciel. Qui m’aura renié devant les hommes sera renié comme fils devant les anges de Dieu. Celui qui aura mal parlé contre le Fils de l’homme pourra encore être pardonné, parce que je réclamerai son pardon auprès du Père, mais celui qui aura blasphémé contre l’Esprit Saint ne le sera pas.

       Pourquoi cela ? Parce que tous ne peuvent connaître l’étendue de l’Amour, sa parfaite infinité, et voir Dieu dans une chair semblable à toute chair d’homme. Les païens ne peuvent y croire par foi, car leur religion n’est pas amour. Même parmi nous, le respect craintif d’Israël envers Jéovêh peut empêcher de croire que Dieu se soit fait homme, et le plus humble des hommes. C’est une faute de ne pas croire en moi, mais quand elle s’appuie sur une crainte excessive de Dieu, elle est encore pardonnée. Mais il ne peut être pardonné, celui qui ne se rend pas à la vérité qui transparaît de mes actes et qui refuse à l’Esprit d’Amour d’avoir pu tenir la parole donnée d’envoyer le Seigneur au temps fixé, le Sauveur précédé et accompagné par les signes annoncés.

       421.9 Ceux qui me persécutent connaissent les prophètes. Les prophéties sont remplies de moi. Ils les connaissent et ils savent ce que je fais. La vérité est manifeste. Mais ils ne l’acceptent pas parce qu’ils veulent la rejeter. Ils nient systématiquement que je sois non seulement le Fils de l’homme, mais même le Fils de Dieu prédit par les prophètes, celui qui est né d’une Vierge, non par une volonté humaine, mais par celle de l’Amour éternel, de l’Esprit éternel qui m’a annoncé pour que les hommes puissent me reconnaître. Pour pouvoir prétendre que la nuit de l’attente du Christ perdure, ils s’obstinent à garder les yeux fermés pour ne pas voir la Lumière qui est dans le monde ; par conséquent ils renient l’Esprit Saint, sa vérité, sa lumière. Le jugement sera donc plus sévère pour eux que pour ceux qui l’ignorent. Me traiter de “ satan ” ne leur sera pas pardonné, car l’Esprit fait, par moi, des œuvres divines et non sataniques. Et porter les autres au désespoir quand l’Amour leur a rendu la paix, cela ne sera pas pardonné, car ce sont toutes des offenses à l’Esprit Paraclet qui est Amour, donne l’amour et demande l’amour, et qui attend mon holocauste d’amour pour se déverser en amour, sagesse et lumière dans le cœur de mes fidèles. Quand cela sera arrivé, ils vous persécuteront encore et ils vous accuseront devant les magistrats et les princes, dans les synagogues et devant les tribunaux. Mais ne vous préoccupez pas de penser à la manière de vous défendre. L’Esprit lui-même vous inspirera quoi répondre pour servir la vérité et conquérir la vie éternelle, de la même manière que le Verbe est en train de vous donner les moyens nécessaires pour entrer dans le Royaume de la Vie.

       421.10 Allez en paix, dans ma paix, dans cette paix qui est Dieu et que Dieu exhale pour en combler ses enfants. Allez, et ne craignez pas. Je ne suis pas venu pour vous tromper, mais pour vous instruire, pas pour vous perdre, mais pour vous racheter. Bienheureux ceux qui sauront croire à mes paroles.

       Quant à toi, homme deux fois sauvé, sois fort et souviens-toi de ma paix pour dire aux tentateurs : “ N’essayez pas de me séduire. Il est le Christ, voilà ma foi. ” Va, femme. Pars avec lui et restez en paix. Adieu. Rentrez chez vous et laissez le Fils de l’homme à son humble repos sur l’herbe avant qu’il reprenne sa route de persécuté, à la recherche d’autres personnes à sauver, jusqu’à la fin. Que ma paix reste avec vous. »

       Il les bénit et retourne à l’endroit où ils ont déjeuné, en compagnie des apôtres. Une fois les gens partis, ils s’étendent, la tête sur les sacs. Dans la lourde chaleur de l’après-midi et le silence épais de ces heures torrides, le sommeil ne tarde pas à les prendre.

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