Une initative de
Marie de Nazareth

Marie confie son vœu au grand-prêtre

novembre de l'an -7
Jérusalem

Vision de Maria Valtorta

      11.2 Marie se trouve toujours au Temple. Elle est en train de sortir, en compagnie d’autres vierges, du Temple proprement dit.

       Une cérémonie a dû avoir lieu, car l’odeur de l’encens se répand dans l’air rendu tout rouge par un beau crépuscule. Je pense que l’automne est déjà bien avancé, parce qu’un ciel doucement mélancolique, comme en un mois serein d’octobre, s’incline sur les jardins de Jérusalem, où le jaune ocre des feuilles près de tomber insère des couleurs claires d’un blond-rouge dans le vert argenté des oliviers.

       Le groupe, ou plutôt l’essaim blanc des vierges, traverse la cour de derrière, monte l’escalier, passe un petit portique, pé­nètre dans une autre cour moins belle, carrée et sans autre accès que cette ouverture. Ce doit être la cour destinée à rassembler les petites demeures des vierges au service du Temple, car chaque jeune fille se dirige vers sa cellule comme une colombe vers son nid. On dirait vraiment un vol de colombes qui se séparent après avoir été réunies. Beaucoup, je pourrais même dire toutes, dis­cutent entre elles à voix basse, mais joyeusement, avant de se quitter. Marie garde le silence. Simplement, avant de se séparer des autres, elle les salue affectueusement puis se dirige vers sa petite chambre, dans un coin à droite.

       11.3 Elle y est rejointe par une maîtresse, moins âgée qu’Anne, fille de Phanuel, mais déjà d’un certain âge :

       « Marie, le grand-prêtre t’attend. »

       Un peu surprise, Marie la regarde, mais sans poser de questions. Elle se contente de répondre :

       « J’y vais tout de suite. »

       Je ne sais si la grande salle dans laquelle elle entre appartient à la maison du grand-prêtre, ou si elle fait partie des maisons des femmes au service du Temple. Mais je vois qu’elle est vaste et lumineuse, élégante, et que Zacharie et Anne, fille de Phanuel, s’y trouvent en compagnie du grand-prêtre, magnifiquement vêtu.

       Marie, arrivée au seuil, s’incline profondément et n’avance pas avant que le grand-prêtre ne lui dise :

       « Approche, Marie, n’aie pas peur. »

       Marie se redresse et avance lentement, non par manque d’empressement, mais par un je ne sais quoi de solennel qui la fait paraître plus femme.

       Anne sourit pour l’encourager, et Zacharie la salue d’un :

       « La paix soit avec toi, ma cousine. »

       Le grand-prêtre l’observe attentivement puis s’adresse à Zacharie :

       « On reconnaît bien en elle la race de David et d’Aaron…

       Ma fille, je connais ta grâce et ta bonté. Je sais que tu as grandi chaque jour en science et en grâce aux yeux de Dieu et des hommes. Je sais que la voix de Dieu murmure à ton cœur les paroles les plus douces. Je sais que tu es la fleur du Temple de Dieu, et qu’un troisième chérubin se tient devant le Témoignage depuis que tu t’y trouves. Je voudrais bien que ton parfum continue à monter avec l’encens à chaque nouvelle journée. Mais la Loi dit autre chose. Tu n’es plus une enfant désormais, mais une femme. Or, en Israël, toute femme doit être mariée pour apporter son fils au Seigneur. Tu suivras donc le commandement de la Loi. N’aie pas peur, ne rougis pas. Je garde à l’esprit ta descendance royale. D’ailleurs, la Loi te protège puisqu’elle prescrit qu’on donne à chaque homme une femme de sa lignée. Mais même si ce n’était pas le cas, je le ferais pour ne pas porter atteinte à la noblesse de ton sang. Tu ne connais aucun homme de ta lignée, Marie, qui puisse devenir ton époux ? »

       Marie lève un visage tout rouge de pudeur. Sur ses cils brille une larme, un premier diamant, et c’est d’une voix tremblante qu’elle répond :

       « Personne.

       – Elle ne peut connaître personne, car elle est entrée ici tout enfant ; du reste, la race de David a été trop persécutée et dispersée pour permettre à ses différentes branches de se réunir pour servir de frondaison au palmier royal, dit Zacharie.

       – Dans ce cas, nous laisserons le choix à Dieu. »

       11.4 Les larmes que Marie retenait jusqu’ici jaillissent alors et coulent jusqu’à sa bouche tremblante ; elle jette un regard suppliant à sa maîtresse.

       « Marie s’est réservée pour le Seigneur, pour sa gloire et pour le salut d’Israël. Elle n’était encore qu’une enfant à peine capable de balbutier, et déjà elle s’était liée par un vœu, précise Anne pour lui venir en aide.

       – C’est donc pour cela que tu pleures ? Pas pour résister à la Loi ?

       – Pour cette seule raison. Je t’obéis, grand-prêtre de Dieu.

       – Cela confirme tout ce qu’on m’a dit de toi. Depuis combien d’années es-tu vouée à la virginité ?

       – Depuis toujours, je crois. Je n’étais pas encore venue au Temple que je m’étais déjà donnée au Seigneur.

       – Mais n’es-tu pas la petite fille qui est venue me demander d’entrer, il y a maintenant douze hivers ?

       – C’est bien moi.

       – Alors comment peux-tu dire que tu appartenais déjà à Dieu à ce moment-là ?

       – Si je regarde mon passé, je vois que j’ai toujours été vouée à la virginité… Je ne me souviens pas de l’instant où je suis née, ni comment j’ai commencé à aimer ma mère et à dire à mon père : “ Mon père, je suis ta fille ”… En revanche, je me rappelle avoir donné mon cœur à Dieu, même si je ne sais pas à quel moment cela a commencé. C’était peut-être avec le premier baiser que j’ai su donner, avec le premier mot que j’ai su prononcer, avec le premier pas que j’ai su faire… Oui, c’est ça : je crois que mon premier souvenir d’amour, je le trouve dans mes premiers pas plus assurés… Ma maison… ma maison avait un jardin rempli de fleurs… il y avait un verger et des champs… et aussi une source, au fond, au pied d’une hauteur, qui jaillissait d’un rocher creusé qui formait une grotte…. Elle était pleine d’herbes longues et fines, qui pleuvaient de toute part comme autant de petites cascades vertes. On aurait dit qu’elles pleuraient, car ces petites feuilles légères, en un feuillage qui ressemblait à une broderie, portaient toutes une goutte d’eau qui, en tombant, tintaient comme un léger carillon. La source chantait elle aussi. Il y avait encore des oiseaux sur les oliviers et les pommiers qui se trouvaient sur la pente au-dessus de la source, et de blanches colombes venaient se laver dans le miroir limpide de la source…

       J’avais oublié tout cela, parce que j’avais mis mon cœur en Dieu et, à part mes parents que j’ai aimés de leur vivant comme après leur mort, ce qui est terrestre avait disparu de mon cœur… Mais tu m’y refais penser, grand-prêtre… Je dois chercher à quel moment je me suis donnée à Dieu… et les souvenirs de mes premières années me reviennent en mémoire… Si j’aimais cette grotte, c’est que j’y entendais une voix plus douce que le chant de l’eau et des oiseaux ; elle me disait : “ Viens, ma bien-aimée. ” J’aimais ces herbes parées de diamants sonores, parce que j’y reconnaissais le signe de mon Seigneur. Je passais mon temps à me dire : “ Vois-tu, mon âme, comme il est grand, ton Dieu ? Celui qui a fait les cèdres du Liban pour l’aquilon a également créé ces petites feuilles qui ploient sous le poids d’un moustique pour le plaisir de tes yeux et pour servir d’abri à tes petits pieds. ” J’appréciais ce silence des choses pures : la brise légère, l’eau avec ses reflets argentés, la propreté des colombes… J’aimais cette paix qui veillait sur la petite grotte, une paix qui semblait tomber des pommiers et des oliviers, tantôt en fleurs, tantôt chargés de fruits…

       Et, je ne sais, j’avais l’impression que la Voix me disait, à moi, oui, bien à moi : “ Viens, magnifique olive ; viens, douce pomme ; viens, source scellée ; viens, ma colombe… ” Bien sûr, l’amour de mes parents m’était doux… Leur voix qui m’appelait m’était douce… mais celle-là ! Celle-là ! Au paradis terrestre, je pense que c’est ainsi que l’entendit celle qui fut coupable, et je ne sais comment elle a pu préférer un sifflement à cette Voix d’amour, comment elle a pu désirer connaître autre chose que Dieu… Mes lèvres ne connaissaient encore que le lait maternel, mais c’est avec le cœur enivré par le miel céleste que j’ai dit alors : “ Me voici, je viens. Nul autre maître que toi, Seigneur, ne possèdera ma chair, et mon âme n’a pas d’autre amour ”… Par ces mots, j’avais l’impression de répéter des choses déjà dites et d’accomplir un rite déjà accompli. L’époux que j’avais choisi ne me paraissait pas étranger car je connaissais déjà l’ardeur de son amour, mes yeux s’étaient faits à sa lumière et ma capacité d’amour s’était développée entre ses bras. Quand cela ? Je l’ignore. Hors de la vie présente, dirais-je, car j’avais le sentiment de l’avoir toujours possédé, je sentais qu’il me possède depuis toujours et que j’existe parce qu’il m’a voulue, pour la joie de son Esprit et du mien.

       11.5 Cela dit, je t’obéis, grand-prêtre. Mais indique-moi comment me comporter… Je n’ai plus ni père ni mère. Sois donc mon guide.

       – Dieu te donnera un époux, et il sera saint puisque tu t’es confiée à lui. Tu lui parleras de ton vœu.

       – Et il acceptera ?

       – Je l’espère. Prie, ma fille, pour qu’il puisse comprendre ton cœur. Maintenant, va, et que Dieu t’accompagne toujours. »

       Marie se retire avec Anne, et Zacharie reste avec le grand-prêtre.

       C’est ainsi que la vision prend fin.

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